Baby Driver commence par une scène d'ouverture d'anthologie. C'est peut-être même la plus belle scène d'ouverture de l'année, du moins parmi celles que j'ai vues actuellement. Rythmée, inattendue, bien filmée, montage nerveux, voilà une course-poursuite en voiture et en musique qui restera longtemps en tête.
C'est peut-être pour cela qu'il m'a fallu un bon quart d'heure, voire une vingtaine de minutes, pour que l'euphorie descende et que je me rende à l'évidence. Cette scène d'ouverture, c'est comme une superbe cerise posée sur un gâteau flasque.
Baby Driver montre vite quel est son projet. Une sorte de mélange de Drive et de Quentin Tarantino, mais sans jamais atteindre le suspense et la tension dramatique du premier, ni la "coolitude" du second (il ne suffit pas de mettre des références par pelletées entières et de la musique cool pour faire du Tarantino, désolé). Une plongée dans le monde des gangsters, mais avec une bande originale qui prend la place de personnage principal et colle totalement au film. Enfin, c'est le projet initial, puisque, dans la réalité, on ne retient réellement du film que sa musique.
Que raconte Baby Driver ? Une histoire vieille comme le film noir, celle d'un pauv' gars qu'a pas eu de chance et qui a une dette colossale à rembourser auprès d'un gangster. Donc, on l'oblige à participer aux casses. Une histoire qui était déjà éculée dans les années 50.
Le casting n'aide pas vraiment à rentrer dans le film, non plus. L'acteur principal est transparent, le parangon de l'inexpressivité. Kevin Spacey est un bloc de marbre qui doit penser que sa seule présence suffirait à embellir le film, et qui ne fait donc rien d'autre. A l'inverse, on voudrait bien que Jamie Foxx soit moins expressif, tant son personnage est caricatural.
Quant aux dialogues...
"_ on pourrait traverser le pays pour l'éternité sans épuiser toutes tes chansons.
_ oui, mais on n'aurait plus d'essence."
Et des répliques comme ça, on en a des pages complètes...
Alors, certes, il y a des points positifs. Les rares scènes d'action sont franchement réussies, que ce soit en fusillades ou en courses-poursuites. Mais trois scènes d'action, ça ne suffit pas à remplir un film.
A plusieurs reprises, on sent que le film aurait pu prendre une autre piste, celle du road movie. Faire revivre l'image mythique d'un couple glamour qui traverse les Etats-Unis sans se fixer de but, sinon vivre au jour le jour et savourer liberté et musique. Mais cela se limite à un rêve des personnages et le film se clôt là où débute le rêve.
Dommage.
Du coup, il ne reste qu'un road movie qui n'avance pas.
(du coup, j'ai beaucoup de mal à comprendre l'engouement pour ce film, ni sa place très élevée dans le top des meilleurs films de l'année. A moins, bien entendu, que ce ne soit révélateur de la faiblesse cinématographique de cette année plutôt morne pour l'instant).