Un regard troublant sur l'Allemagne de l'Est liberticide

Salle bien remplie, un mois après sa sortie. Le succès de Barbara, film discret qui ne faisait l'objet d'aucune super campagne de promotion, atteste bien de sa réussite. C'est en effet une perle authentique qu'a réalisé Christian Petzold, nous livrant de manière sombre et touchante la lutte incessante de Barbara pour rejoindre son riche amant parti à l'Ouest, pour fuir une société qui l'opprime, et le petit hôpital de Province où elle a été mutée sous surveillance étroite de la Stasi. Dans cet univers hostile, Barbara se protège derrière un masque de froideur et un ton hautain, dissimulant la femme attentionnée et sensible qu'elle se révèle progressivement être face à ses patients. Elle mène une lutte de tous les instants contre des ennemis qui peuvent se cacher derrière tous les visages, et entretient une méfiance extrême à l'égard de son troublant collègue qui semble lui témoigner une affection sincère.

Barbara fait partie de ces films prenants qui savent reproduire la dure réalité du régime est-allemand. Une petite merveille comme le cinéma allemand sait si bien en faire, qui montre, sans chercher à démontrer à tout prix. Et s'en trouve d'autant plus efficace. Le montage ne vise pas à créer un suspens artificiel à grand renfort de musique. Au contraire, le film se déroule sans précipitation, à l'instar de l'insoutenable attente de son héroïne. Et le spectateur de ressentir son angoisse quotidienne d'être compromise, envoyée à nouveau en prison et perdre toutes les chances de s'enfuir un jour de ce pays où « le bonheur n'est pas possible » selon Barbara, tout en comprenant ses tiraillements internes liés à l'abandon de patients qui ont besoin d'elle. D'une manière troublante, son insatiable volonté de fuite se confond parfois avec de l'égoïsme, et pose tout l'enjeu pour les soviétiques de refréner la fuite des cerveaux, vitaux pour la société. C'est l'un de ces rares films dont l'essence même est celle d'un cinéma engagé et souvent peu accessible, mais auxquels la qualité de leur réalisation donne la chance de toucher un public plus large. Barbara est un bel hommage à ces hommes et ces femmes pour qui la vie n'a plus de sens si elle n'est plus associée à cette valeur fondamentale qu'est la liberté, et qui se battent contre les « salauds », officiers de la Stasi ici, et plus largement ceux qui participent aux pouvoirs liberticides.
Mylex
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le 4 juin 2012

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