Le film commence sur un astronaute boudiné.


La scène fait preuve d’une certaine longueur. D’une certaine langueur, dirons d’autres.


Et


JANE FONDA EST NUE


L’orgasme avant les préliminaires.


Le mystère est mort. L’érotisme caduc. Même pas le temps de bander son imagination. Est-ce bien la peine de continuer ?


Oui. En évacuant précocement la frustration, on se concerte sur l’essentiel. Et il est vrai que je ne retiendrai pas de ce film le corps nu de Jane Fonda, aussi beau soit-il, mais son visage, son sublime visage.


Si l’on retient du film son actrice, Barbarella, c’est avant tout une époque. Dans sa BD, Jean-Claude Forest annonce et matérialise la libération sexuelle de la fin des années 60. Le film de Vadim sort d’ailleurs en 68.


Dans Barbarella, le monde est pacifié et le salut officiel est « LOVE ». L’amour y est libre, la femme peut s’enivrer avec un narguilé à l’essence de mâle. Le propos est extrêmement novateur et provocateur dans les années 60. Il s’agit là de casser quelques normes sacrées, comme la famille quand le trappeur est un traque-mioche, chargé d’attraper ces petites créatures sauvages et cruelles (cf. l’attaque lente des poupées moches en plastique).


D’autres leçons sont plus surprenantes, car si, on en croit Vadim,


Le futur est moquette.


Le propos n’est pas pour autant naïf, car le libertinage peut se transformer en Sogo, contraction des noms Sodome et Gomorrhe, où l’assouvissement du plaisir aboulie la frontière entre le bien et le mal et cause le malheur des pauvres bougres piégés dans le labyrinthe de leur condition. Barbarella se pose ici comme l’incarnation d’un amour pur, naïf et même angélique. Celui-là seul à pouvoir résister à la Machine excessive, sorte d’orgue à orgasme, ou org(u)asme.



« Tu vas regretter de ne pas être morte de plaisir » (Durand Durand)



D’une certaine manière, Vadim fait une démonstration du bon et du mauvais libertinage.


Il ne faut pas ôter au film son humour, parfois volontaire. Le sexe à la Terrienne est très drôle et le mot de passe de la résistance, Llanfairpwllgwyngyllgogerychwyrndrobwllllantysiliogogogoch, est d’autant plus savoureux qu’il s’agit du nom d'une ville du Pays de Galles.


Malheureusement, le film est aussi drôle malgré lui. Le poids des ans est plus cruel pour les effets spéciaux que pour les dessins. La beauté intemporelle de Jane fonda tranche avec les images horriblement datées du film, quand elles ne sont tout simplement pas moches.


Pour l’histoire, je reconnais à Vadim que sa principale erreur est d’être fidèle aux trames de Forest, que je résumerai en parodiant Audiard :


C’est curieux chez Barbarella, cette manie de s’assommer, de déchirer ses vêtements et de coucher avec quiconque l’aide.


Dans la BD comme dans le film, l’histoire n’a ni queue ni tête.



« Il faut que je me débarrasse de cette queue. » (Barbarella)



Une question m’a toutefois titillé tout le long : comment Jane Fonda a pu accepter de tourner dans ce film ?


J’ai trouvé un élément de réponse peu glorieuse dans cet article.


----- Post-coïtum


Quelques recherches m’ont m’amené à découvrir que certains veulent ressusciter Barbarella. Il aurait été question d’une adaptation par Robert Rodriguez, avec Rose McGowan. Le projet le plus proche de la réalisation est une série par Nicolas Winding Refn.


Dans un cas comme dans l’autre, et malgré mon intérêt pour ces deux réalisateurs, je trouve l’idée extrêmement mauvaise. Barbarella est une incarnation, un symbole mais aussi un instantané d’une lutte pour la libération sexuelle dans une société ultra puritaine. Le combat sur l’égalité homme-femme ou sur les mœurs a changé. A mon sens, nous sommes aujourd’hui dans une société qui joue le grand écart entre l’ultra-sexualisation et le sexuellement correct. Aujourd’hui, Barbarella ne serait qu’une parodie ou qu’un prétexte à montrer une belle femme dénudée. Il est plus pertinent de créer de nouveaux modèles féminins, à l’image d’une Furiosa dans le dernier Mad Max.

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le 12 août 2016

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