Avec presque 3 millions de téléspectateurs, Bénie soit Sixtine est, à n'en point douter, un succès pour France 2. Il faut dire que le sujet a de quoi attirer : une plongée dans une secte catholique d'extrême droite. Au menu donc : racisme, misogynie, homophobie et intégrisme religieux. Autant de sujets lourds qui permettront à la réalisatrice Sophie Reine de briller, non pas pour sa mise en scène (inexistante), mais pour son engagement militant pas très risqué.
Revenir sur l’histoire du film permet de pointer du doigt plusieurs problèmes rendant le tout absolument ridicule. Capucine Valmary (bonne actrice) joue une jeune femme catholique assez naïve, tombant amoureuse d'un jeune homme séduisant, catholique aussi. Seulement, c'est après le mariage qu'elle découvre que cet homme n'est en fait qu'un méchant militant identitaire d'extrême droite, faisant partie d'une véritable secte : les frères de la Croix. Le spectateur est donc en droit de se demander : comment cette gourde (parce que c'en est une) n'avait-elle rien remarqué avant le mariage ?
Après ce problème de taille, l'on découvre toute l'horreur de cette secte. Le mari ne fait qu'utiliser sa femme comme un vulgaire objet de plaisir, tous les militants de "La Milice" (subtil) ont des regards noirs de gros méchants, il faut prier tout le temps pour tout et n'importe quoi, le prêtre dit des choses pas très sympas dans un monde où il faut pourtant être gentil, etc. Mention spéciale à Valérie Karsenti, jouant la mère du jeune époux, qui ne fait paraître aucune émotion dans un jeu faussement subtil, à tel point qu'on se demande si elle ne va pas se métamorphoser en robot tueur à la fin. Bref, chez les Frères de la Croix, à part dire des trucs racistes et homophobes, on ne fait pas grand chose de sa vie. Le seul trait de caractère des membres de la secte, c'est d'être méchant. On notera d'ailleurs l'absence totale de renseignement sur le sujet des sectes catholiques traditionalistes. L'équipe du film s'est, visiblement, seulement appuyée sur le livre qu'elle adapte. En témoigne l'accoutrement du prêtre, totalement à côté de la plaque. Ce dernier se fait appeler "Père Mathias" par les fidèles alors que toute personne ayant fréquenté ces milieux sait pertinemment qu'on n'appelle pas un prêtre "Père" et encore moins par son prénom.
Heureusement, le personnage principal arrive à fuir et tente de refaire sa vie. Tout va trop vite pour elle d'ailleurs. En quelques jours, elle trouve un toit, des amis sur qui compter, et même un travail pour la paroisse du coin. Macron n'avait donc pas tort, il suffisait bien de traverser la rue. Cette nouvelle vie sert d'opposition à l'ancienne. Avant, elle était sous l'emprise de son mari, maintenant elle est libre de coucher avec qui elle veut. Avant, c'était un prêtre blanc en habit qui disait des choses choquantes, maintenant c'est un prêtre noir en chemise toujours avec le sourire. Avant, c'étaient des militants d'extrême droite avec des regards méchants (tous blancs), maintenant ce sont des gens cools, ouverts d'esprit (de toutes les couleurs). Le film ne cesse de nous jeter à la gueule son message d'ouverture aux autres, niais et lourd, sans aucune prise de risque, et sans aucune zone grise.
Et tout cela est bien dommage, parce que contre toute attente, ce film ne tient pas un message anti-religieux. Le personnage principal garde la foi malgré tout, ne renie pas sa religion, et sait faire la part des choses. Là où la réalisatrice aurait pu se montrer maligne à la fin, en montrant une belle messe avec de beaux chants religieux pour terminer le film, elle choisit plutôt de nous jouer du gospel dans une église, sans aucun rite, juste le cadre d'une répétition de chorale. De quoi faire sourire de gêne le spectateur qui ne reviendra évidemment pas à la messe parce que les gens sont gentils et chantent à peu près juste. Mais connaissant le partenaire du film, le très sérieux journal La Croix, le message n'est pas étonnant.
Bref, Bénie soit Sixtine est un très mauvais film, plat dans sa réalisation, à côté de la plaque, ridicule, que les 3 millions de téléspectateurs auront sans doute oublié dans quelques semaines. Et c'est tant mieux.