Les androïdes rêvent, les spectateurs dorment.

J'aurais essayé, j'aurais vraiment essayé.
L'ayant vu une première fois en dvd et n'ayant que très moyennement aimé, j'ai sauté sur l'occasion de le voir au cinéma lors de sa ressortie en salle. Peut être s'agit il là d'un genre de film qui ne peut s’apprécier que sur grand écran, que le visionner dans ces conditions va changer à jamais ma vie de cinéphile, que je vais enfin comprendre, adhérer au culte qui s'est fait autour de ce supposé chef d’œuvre et oublier ma honte de spectateur incapable d'y reconnaitre du génie!
Je trépigne d'impatience, je gagne mon siège, deux heures plus tard, je comprend qu'il va falloir me faire une raison, je ne comprendrais jamais.


Alors bien sûr ce film à d'immenses qualités.
Sur la forme, c'est captivant. La direction artistique est brillante. l’esthétique visuelle et sonore fascine. Ce qui fait tant d'effet c'est le contraste entre le gigantisme, l'ampleur, la dimension onirique dans laquelle notre imaginaire, comme celui des personnage s’évade, et la réalité de cette ville dense, insalubre et oppressante qui sollicite nos sens avec tant d'efficacité.


Les personnages sont partie intégrante de cette esthétique très aboutie, liés presque organiquement à elle. Eux même éléments de décor désincarnés, androïdes ou humains. Les séquences de mort sont à mon avis les plus belles du film, tant l'irruption d'une caractéristique aussi viscérale l'instinct de survie, ou aussi superbement humaine que l'acceptation, paraît hors de propos dans un cadre aussi froid et stérile. Ce sont d'ailleurs les rares moments du film ou je suis en empathie avec Deckard, ce dernier étant surpris que l'humanité se soit frayé un chemin chez les androïdes, moi qu'elle ait réussi à surgir dans l'intrigue.


Ça, c'est pour les bons côtés


Maintenant il faut le dire, c'est chiant.
Attention ! Je ne dis pas lent ou contemplatif, non non non, il ne faut pas tout confondre.
Je n'ai absolument rien contre la fréquence des plans d'ensemble, la plupart du temps, c'est à eux que je dois mes brefs regain d'intérêt. Non, le problème de ce film, c'est son personnage principal.


Je ne comprends pas comment on est censé en avoir quoique ce soit à faire de ce qui peut arriver à Deckard.
Avoir un personnage mystérieux, c'est une chose.
Mais lorsque, au cours de l'enquête le spectateur ne comprend pas ses objectifs, les scènes se retrouvent sans enjeux et le spectateur sans empathie.
Seule exception, l'interrogatoire de Rachel. On connait l'enjeu, on a déjà vu une scène similaire avec laquelle comparer. On peut donc en apprendre un peu plus sur le meilleur des blade runners car on peut évaluer son travail, et s'identifier un peu a lui car on sait ce qu'il cherche à obtenir.
Exception faite de ce passage, Deckard est un étranger.
Les affrontements l'opposant à ses adversaires n'y changeront rien, tant ces conflits paraissent superficiels, inoffensifs, n'atteignant jamais le personnage au point de laisser entrevoir sa fragilité au spectateur.
Sans jamais donner l'impression d'être réellement en danger ou de se remettre en question, Deckard continu sa route.
Du coup, tout paraît trop facile, on arrête de croire au film.
On se dit qu'en fait Deckard c'est le pire des Blade Runners, et que ses potes organisent une fausse traque pour booster son ego avec des ennemis payés pour faire semblant de vouloir le tuer.
Les quelques pointes d'humour n'aident pas à prendre les affrontements au sérieux.
On ne peut pas proposer les codes d'un film noir avec un héros mystérieux et mutique, et le transformer en sous Indiana Jones le temps de quelques séquences histoire de montrer qu'en fait, on prend un peu ça au second degré.


Voila, c'était pour moi le problème majeur du film car il empêche toute immersion.


Maintenant, en cadeau, trois séquences bonus qui dérangent, et que j'aurais pu supporter en serrant les dents/ levant les yeux au ciel si le reste du film avait été meilleur.


1 La scène du baiser


Alors d'accord, tous les cinéastes n'ont pas eu la clairvoyance nécessaire pour s'extraire de leur époque, et offrir à leurs personnages féminins un traitement qui n'aurait pas à rougir des avancées féministes. Mais entre manquer de recul pour identifier un cliché sexiste, et écrire une horreur pareille ya quand même une petite marge.
Je veux dire, quand on veut pas coucher avec toi, empêcher la fille de sortir et la balancer contre un mur pour la faire changer d'avis, C'est quand même un peu moyen. Mais bon de toute façon c'est une androïde, elle peut pas se fier à ce qu'elle ressent, alors dans le doute Deckard a qu'à se servir, yeurk.


2 l'envol de la colombe


C'est pas poétique c'est ridicule, dans n'importe quel autre film on se poserait même pas la question.


3 l'origami de fin


Soit on nous explique rien, soit en fait trop.
Franchement ce petit bout de papier, on le voit, on comprend.
Il n'est pas nécessaire que Deckard se baisse, le ramasse, de faire un insert et de lancer une voix off pour que le spectateur capte ce qu'il se passe.
C'est la dernière séquence du film et elle a 10 secondes de retard sur le spectateur.

Towk
5
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le 9 nov. 2015

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