Le retour du roi
Quelle purge... Alors que Blair Witch premier du nom avait quasiment inventé un genre, ici on tombe sur un truc qui n'a même pas l'intelligence d'avoir compris ce qui était bon dans le premier...
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le 31 janv. 2017
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The Blair Witch Project avait engendré un buzz sans précédent l’année de sa sortie, en 1999. Véritable coup de génie en terme de communication qui à réussi à se présenter comme de véritables images retrouvées que comme une oeuvre de fiction. Les acteurs jouant alors leurs propres rôles et tout semblait indiquer que tout leur était réellement arrivé. Même si la supercherie n’a pas tenu, elle a eu suffisamment d’importance pour devenir culte et démocratiser le genre du « found footage » qui maintenant est même utilisé à tort et à travers, tombant dans la médiocrité. Le film en lui-même n’était pas particulièrement réussi mais il avait un sens de la suggestion et du hors champ assez admirable, faisant de lui une expérience encore intéressante aujourd’hui. Adam Wingard, le réalisateur de ce nouveau film, a compris que si il voulait faire une suite qui ait l’aura de son aîné, il devait créer le buzz. Montant son projet sous le nom de The Woods, il le présente ainsi la première fois à un public sous ce nom pour ce qui s’est avéré très vite être la suite directe -laissant de côté la suite illégitime et ratée du nom de Book of Shadows: Blair Witch 2– du Blair Witch Project. Le buzz a eu son petit effet mais il faisait office de « one shot » car une fois passé la surprise pour cette poignée de spectateur, le reste du monde découvre ce film en connaissance de cause, ce qui lui enlève de son aura si particulière.
Surtout qu’au final, ce Blair Witch n’a pas grand chose de plus à offrir que son aîné. Même si il se montre plus fidèle et intéressant dans sa vision de l’oeuvre originale que sa suite illégitime, il reste beaucoup trop calqué sur son modèle. Le scénario est dans les grandes lignes absolument identique, au point qu’on est plus face à un remake qu’une suite malgré le fait que l’intrigue se déroule plusieurs années après le premier film. Il s’agit de suivre les traces de ce qui a déjà été fait et de tomber dans les mêmes erreurs avec pour seule nouveauté l’évolution technologique qui permet de dynamiser les procédés de mise en scène. Si vous espérez des révélations sur le précédent opus, des éclaircissements sur la sorcière ou qu’encore plus de mystères s’ajoutent au mythe, vous pouvez passer votre chemin. Même si on s’amuse ici à nous dévoiler un peu du physique de la sorcière pour satisfaire une certaine soif de curiosité cela tranche avec le côté suggestion de son prédécesseur et tombe dans des artifices plus grossiers et vulgaires. Le design de cette créature est en plus assez commun et décevant, tandis que le film s’embourbe dans une succession de surenchères sonores et visuelles: les personnages qui sautent sur la caméra sans raisons apparentes, qui hurlent dans les micros etc. Tout cela devient assez vite redondant car c’est majoritairement ce qui sert de mécanique de peur, le film n’instaurant que très rarement une ambiance pour créer l’angoisse. Mais il est difficile de créer de l’angoisse et des enjeux lorsque les personnages sont idiots et clairement là pour faire office de chair à canon, le procédé est d’ailleurs le même jusqu’à la fin: un personnage se sépare du groupe, il meurt et ensuite on passe à un autre.
Même si le constat est globalement négatif jusqu’ici, tout n’est clairement pas à jeter. Certains personnages arrivent à sortir du lot, comme les deux guides qui accompagnent le groupe d’amis. Malgré qu’ils soient sous-exploités, ils donnent une nouvelle dimension au mythe et emmènent le récit à un endroit assez inattendu lors du climax. Il y a quand même une envie d’apporter d’autres pistes de lecture qui ne sont pas inintéressantes, et laisser ses deux personnages en retrait permet au final de vraiment créer un sentiment de mystère. De plus, Adam Wingard apporte beaucoup d’idées de mise en scène assez sympathiques, faisant du film une expérience visuelle avant tout. Il utilise tous les procédés technologiques qu’il a à sa disposition pour transcender son récit, n’hésitant pas à s’affranchir du point de vue d’un seul personnage ou encore de jouer habilement avec la verticalité avec quelques plans en drone, faisant de la forêt un terrain de chasse encore plus vaste. Il est dommage par contre qu’il doive souvent survoler certaines de ces idées intéressantes, le film étant assez court et ayant à sa disposition beaucoup d’outils à explorer, il va très vite passer sur autre chose sans jamais prendre le temps de s’arrêter sur une situation. C’est quelque chose qui se remarquera surtout dans le climax, qui est assez formidable d’ingéniosité et de tension mais qui passe en revu beaucoup trop de procédés en un laps de temps bien trop court. Notamment la dernière idée brillante du film, qui se voit être expédiée en quelques secondes. Lors de ces dernières minutes, Wingard arrive vraiment à poser une atmosphère lourde et malsaine qui trouve son intensité dans une scène sidérante dans des cavités souterraines qui explore à merveille la peur d’être enterré vivant et la claustrophobie.
Blair Witch n’est donc pas le film qui va ravir les fans du premier opus car il n’est clairement pas à la hauteur de son héritage mais il n’est pas le long métrage qui va lui faire honte. Même si il se montre plus vulgaire dans sa surenchère horrifique et qu’il n’apporte rien en terme de scénario, il faut lui reconnaître d’être une expérience visuelle souvent bluffante qui, pour ça, vaut le détour. Il tombe dans les clichés des personnages idiots mais peu compter sur un casting convaincant pour faire croire à l’entreprise tandis qu’Adam Wingard, qui avait déjà fait sensation avec You’re Next en 2013, s’impose comme un metteur en scène ingénieux qui arrive par moments à totalement surpasser le précédent film sur la forme. Blair Witch risque de décevoir les amateurs du premier long métrage, mais il saura trouver son public parmi les fans de sensations fortes, car même si le film est juste moyen, l’expérience n’est pas désagréable pour autant surtout qu’elle s’impose comme la meilleure variation du found foutage de ses dernières années.
Créée
le 20 sept. 2016
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