L’entreprise de modernisation entreprise par Disney sur Snow White est tout à fait légitime, tant notre conception de l’héroïsme au féminin a changé depuis bientôt un siècle : non plus seulement une figure protectrice et garante d’une harmonie qui risque à chaque instant de voler en éclats – harmonie familiale étendue aux relations de pouvoir entre la royauté et ses sujets, que l’œuvre originale faisait naître en des temps d’incertitude – mais aussi une personne à part entière, disposant de ses propres convictions et moyens d’action. Nous regretterons cependant que la bien-pensance du film mute en éloge de la psychologie positive à grands renforts de phrases moralisatrices et de séquence de liesse façon High School Musical (Kenny Ortega, 2006, 2007 et 2008), où une horde de comédiens saute dans tous les sens, monte sur les tables en jetant des confettis, qui écrasent les personnages et leurs enjeux sensibles.
Car il faut bien reconnaître la qualité du spectacle mis en scène par Marc Webb, cinéaste n’ayant eu de cesse de représenter de jeunes adultes engagés dans une exploration de leur identité respective au contact d’autrui, dans un dialogue entre le monde de l’enfance – qu’ils quittent – et le monde des adultes – qu’ils s’efforcent d’intégrer. Snow White complète ainsi 500 Days of Summer (2009) ou le diptyque The Amazing Spider-Man (2012 et 2014) en restituant à Blanche Neige et au prince charmant une relation véritable, naïve et stéréotypée comme le sont la plupart des histoires d’amour. La forme qu’il compose s’avère des plus maîtrisées, bénéficie d’une lisibilité appréciable et d’effets visuels magnifiques, mention spéciale à la courte séquence dans la forêt aux allures de cauchemar ou à la confrontation ultime devant le miroir.
Résistons donc aux vains assauts des masses qui tirent de la haine un facteur de rassemblement voire de définition structurelle (faire communauté par et dans la haine) à l’encontre d’artistes et d’œuvres que seul le jugement esthétique saurait apprécier, valoriser ou invalider.