Le film « in » d’Antonioni des années soixante avec ambiance londonienne garantie et clin d’œil appuyé aux Beatles et à Lindsay Anderson… Un film sur la photo bien sûr, mais surtout sur l’image, dans sa fonction essentielle, c’est-à-dire celle de voir ce qui est caché, voire ce qui est invisible. La scène de la fin, extraordinaire de poésie et d’humanité, est essentielle pour la compréhension du propos : sur un court de tennis, une troupe ambulante de mimes feint de jouer une partie imaginaire avec une balle invisible, jusqu’à ce que le photographe (rôle à facettes joué très justement par David Hemmings) finisse par entrer dans le jeu en renvoyant la balle d’une façon aussi symbolique que réelle… Les acteurs sont évidemment dirigés à la perfection par un des maîtres en ce domaine, les images sont léchées et possèdent autant de force esthétique que narrative, le scénario est pensé à chaque seconde et déroule peu à peu une histoire dont nous ne saurons pas plus que ce que les images voudront bien nous en montrer… Qui a tué qui et pourquoi ? Il y a toujours forcément un moment où on ne peut pas agrandir davantage une image… C’est à ce moment précis que l’imaginaire vient prendre le pas sur la réalité, révélant la construction tout aussi imaginaire de l’être humain et sa vacuité devant le monde… Un chef-d’œuvre de plus d’Antonioni, à la fois sur le plan cinématographique et sur le plan philosophique.