Il est pas Moshe Hartnett
Véritable O.V.N.I. filmique en carton pâte, bariolé et sous influence, embarquant un lot de guests aussi improbables (Gackt) qu'étrangement fourrées dans la même galère (Josh Harnett), Bunraku s'avère pourtant être une curiosité de genre pas trop mal foutue.
Je vais pas vous faire un cours sur les arts du théâtres de marionnettes japonais, on s'en fout, z'avez qu'à regarder sur Wikipedia.
Je vous dirai seulement que cette influence revendiquée parmi tant d'autres sert de base (de prétexte?) à pas mal de partis pris artistiques pour lesquels le montant du budget doit aussi y être pour quelque chose. Au début ce qui surprend le plus (mis à part un casting de l'espace) c'est inévitablement la direction artistique qui...saute aux yeux.
Un drôle de mélange de CG stylisées (ombres chinoises, effets origami, simili marionnettes de synthèse, sérigraphie avec caches), de mouvements de caméra émétiques, de personnages incrustés, de couleurs criardes, de décors minimalistes et aux proportions artificielles, de costumes de scène et de lumières poussives; qui peut s'avérer de façon compréhensible être un vrai repoussoir à audience.
M'enfin, il parait que certaines personnes ont aimés Speed Racer, alors pourquoi pas?
Cependant, pour qui parvient à s'accrocher et à ne pas faire de crise d'épilepsie, passé la surprise du début tous les éléments réussissent à faire parti d'un tout cohérent et relativement bien dosé; ce qui confère mine de rien et malgré les clins d'œil volontaires ou non à certains films très plastiques déjà existant, une certaine personnalité, une ambiance assez sympathique.
L'ambiance justement emprunte pas mal à Sin City par le procédé éculé de la voix off au ton faussement philosophique, par un travail plastique à mi chemin entre le théâtre, le roman graphique et le manga, ainsi que par l'aspect choral rendu par une poignée de personnages d'égal importance, et réussi là où un The Spirit s'était lamentablement planté et ridiculisé; sans égaler le premier certes, mais sans le parodier non plus. C'est déjà pas mal.
L'intrigue, mince comme un cheveu de Woodie Harrelson, lorgne quant à elle du côté de Kill Bill avec une histoire de tueurs à tuer pour tuer le chef des tueurs sur fond de vengeance personnelle stéréotypée; chef des tueurs lui-même résolu et n'attendant que d'être délivré de sa condition, en bon tueur vieillissant qu'il est. S'en suivent pains dans la gueule, combats de sabres, courses poursuites, et autres trucs d'abuseurs que les amateurs apprécieront.
Rien qui tue (hoho), mais le prétexte à fait ses preuves.
Il fallait oser réunir une star de la chanson pour midinette japonaise, Harrelson, Harnett, Moore et Perlman dans un tel film. A priori WTF le casting pourtant tient pas mal la route: Gackt aurait pu faire pire, Woodie est plutôt sympatoche dans son rôle de barman mentor, Harnett est sobre mais fait bien son job de badass qui pète du nez, Demi n'en fait pas des caisses et Perlman cachetonne un petit peu dans ce rôle de bûcheron en bois, mais apporte tout de même le minimum de charisme syndical à tout big boss qui se respecte.
On est surtout surpris par la sympathie qu'inspire le film (pour peu que vous ayez survécu aux a priori des premières minutes), dûe à un duo aux antipodes qui fonctionne contre toute attente, un dynamisme salvateur dans la réalisation et quelques idées graphiques bienvenues. L'intrigue est peut être creuse dans le fond et déjà vue mais a le mérite d'être traitée de façon efficace. Et encore une fois, la direction artistique au parti pris bien appuyé ne manque pas de pertinence et de qualité, sous réserve que vous puissiez pardonner un manque de budget parfois évident.
Un objet filmique, selon l'expression con, déconcertant, pas très original mais peu banal, auquel il faut donner sa chance si vous aimez les films de genre sous influence, et qui se permet même de citer directement Fight Club dans la toute dernière minute. Une plutôt bonne surprise; celle d'un très bon mauvais film.
P.S: Merci à @Aurea et @Tekk de m'avoir inspiré ce titre mémorable sans le vouloir, j'espère qu'en tout cas eux ne m'en voudront pas.