On parle beaucoup en ce moment avec le Snyder's Cut de la friction entre réalisateur et producteurs et de son impact sur le résultat final. "Caligula" de Tinto Brass en est un excellent exemple.
Tinto Brass avait en tête de retranscrire la vie décadente de l'empereur Caligula. Le film, écrit notamment par le scénariste de Ben-Hur, devait être avant tout un péplum avec des scènes érotiques pour les bacchanales organisées dans le palais.
On peut d'ailleurs s'apercevoir de cette ambition dans le soin apporté aux décors qui sont gigantesques et aux costumes. Même chose pour le casting : Malcolm McDowell, Peter O'Toole, Helen Miren. Incontestablement, c'était avant tout un péplum qui contenait des scènes érotiques pour être plus réaliste qu'un film érotique à l'époque des Romains.
Mais, et c'est là le loup, Bob Guccionne (le propriétaire du magazine "Penthouse") oeuvre en sous-main et fait tourner des scènes pornographiques dans ces décors à l'insu de Brass, qu'il intégrerera ensuite au montage final après avoir fait partir le réalisateur !
Réalisateur qui reniera toujours cette oeuvre alors qu'elle fut son plus grand succès et qu'elle marqua durablement la suite de sa carrière.
Plusieurs montages existent aujourd'hui : un raccourci, conforme à l'idée de Brass, un qui est celui sorti sur les écrans français et un autre, le plus long, est celui qui est sorti à l'international.
Ici, je vais critiquer celui que j'ai vu : le plus long. Celui qui contient les fameuses scènes ajoutées par le producteur.
Et, lorsque l'on connaît l'histoire passionnante derrière ce film, on détecte facilement ces fameuses scènes : elles n'apportent rien sur le plan de l'histoire et relèvent plus d'un fantasme du XXème siècle que de l'idée que l'on peut se faire d'une bacchanale.
Parfois gore, ouvertement érotique, il serait toutefois dommage de réduire "Caligula" à sa réputation sulfureuse. Il est bien plus que cela.
Il est avant tout un bon péplum, sans batailles de légionnaires mais enfermé dans un palais avec des jeux de pouvoirs et une plongée dans la psychologie des personnages, sombrant petit à petit dans la folie.
McDowell, O'Toole et compagnie livrent un jeu convaincant même si légèrement exagéré parfois. Certains plans de Brass sont également très beaux et chargés en symboles.
J'ai été fasciné par ces décors gigantesques en carton pâte, par cette photographie à base de rouges et par l'histoire (un peu révisitée) de l'empereur.
Au point que les 2h30 sont passées très vite. Alors n'hésitez pas à aller au-delà de ce à quoi l'on réduit injustement ce film. Vous y trouverez un film intéressant au milieu des scènes de Guccionne et un objet d'étude passionant pour les cinéphiles.