Je ne sais pas quel constat je dois tirer de ce film. D'un côté, il m'inspire une tristesse à pleurer, et de l'autre une joie incroyable.
J'ai l'impression que Marker a l'air de nous dire que le monde va quelque peu mal, que les opprimés existent plus que jamais et qu'ils existeront toujours. Le voir presque attristé du peu d'intérêt qu'accordent les gens sur les manifestation pour le Tibet par rapport à d'autres choses plus futiles, ça me fait me sentir bizarre.
Chats perchés, c'est un drôle de film, qui me donne foi en le cinéma, c'est un cinéma dans lequel je me retrouve, proche du quotidien, du réel, de la vie, de l'actualité et en ce sens je ne peux qu'admirer Marker pour ça. C'est vraiment le genre de trucs que j'aimerais faire, me promener dans Paris avec ma caméra et filmer les gens, les choses qui m'interpellent, penser... Comme disait Nietzsche, seules les pensées qui viennent en marchant ont de la valeur. J'aime beaucoup le film pour ça, comme dans Sans Soleil (qui restera je pense dans le futur un de mes films fétiches)il arrive à capter une émotion, un visage, à le figer une fraction de secondes, visage qu'on ne reverra peut-être jamais, qui ne restera qu'un vague souvenir au fond de la mémoire.
Mais bien plus, Chats perchés est un film politique, assez acerbe, engagé, on peut ne pas être d'accord avec le propos tenu (ce n'est pas forcément mon cas) mais forcé d'admettre que c'est fait avec une intelligence rare. Les cartons de texte ont remplacé la voix-off, c'est peut-être un peu moins fort et hypnotique, mais finalement le procédé n'est pas si différent et me plaît tout autant. Il faut voir la manière avec laquelle Marker va assumer ses idées, montrer ce qu'il veut dire en créant un monde d'images et de sons absolument fascinant. A ce titre, la fin du film est assez monstrueuse et orgasmique, à la fois belle et triste. Si seulement ce fameux chat jaune de la liberté pouvait venir nous sauver...
J'en ressort assez troublé et ébloui, je pense que c'est un film dont on ne peut ressortir indifférent, qu'on adhère aux idées de Marker ou nom. Difficile de ne pas voir là-dedans comme l'apogée du cinéma documentaire pour quelqu'un qui comme moi découvre le cinéma et n'avait jusqu'alors pas d'affinité particulière avec le genre. Comme quoi pas besoin de grand chose pour faire du grand cinéma, et ça, ça me fait énormément plaisir.