Un peu comme les solides artisans du bis italien, Lee Frost est un réalisateur qui se sera frotté langoureusement à de nombreuses nuances du cinéma d'exploitation américain allant du mondo à la nazisploitatation en passant par le western, l'érotisme, la comédie, le film de femmes en prison, la blaksploitation et donc la bikersploitation, un sous genre très spécifique aux USA. On retrouve donc des voyous sur des grosses Harley, des poupées dans des jeans serrés, de la poussière et des règlements de compte avec accessoirement Marvin Gaye dans son unique rôle au cinéma.
Contrairement au résumé un poil mensonger de Sens Critique nous n'avons pas affaire ici à un béret vert de retour du Vietnam mais à un sergent instructeur formant les soldats appelés à y partir prochainement. Lorsque la fiancée de ce dernier meure dans un accident de la route provoqué par un membre d'une bande de bikers, il décide avec l'aide de trois autres soldat de s'introduire dans ce milieu afin de remonter la piste jusqu'à retrouver le meurtrier.
Chrome and Hot Leather est un petit film d'exploitation carré et efficace de 1971 dont l'excellente tenue de route ne souffrira d'aucune sortie de piste majeure. Le film de Lee Frost est très classique dans sa mise en scène et son déroulement et l'on sent que cette production reste antérieur aux futurs outrances des seventies. Autrement dit si vous espérez de la violence à gogo, de l'action à tout va et de l'érotisme gratuit vous risquez d'être très déçu car si le film propose bel et bien ces ingrédients c'est avec mesure, réserve et parcimonie. Même l'aspect revenge movie se fera dans le cadre des bonnes manières, notre sergent justicier à la mâchoire carré souhaitant rien de plus que remettre le responsable de l'accident de sa petite ami à la police sans trop faire de casse et surtout sans tuer personne. Nos quatre militaires après avoir apprivoisé leurs Kawaki rouges lors d'une séquence plutôt comique se lanceront donc dans l'univers des gangs motorisés jusqu'à retrouver la meute de T.J. interprété par l'impressionnant, charismatique et moustachu William Smith ( Le père de Conan dans le film de John Millius).
Chrome and Hot Leather est un sympathique divertissement avec de la castagne, des grosses bécanes, des pépées bien roulées et des explosions. Le film de Lee Frost qui prend les contours d'un thriller d'action et de films de bonhommes comporte également quelques notes d'humour pas désagréables. Parmi les quelques défauts du film on notera toutefois une bande originale parfois bien trop légère et guillerette pour tout à fait coller à l'action sans dégager une sorte de décalage comique assez malvenu. De manière consciente ou pas (tout film étant le reflet de son époque) Lee Frost marque une nette opposition entre cette jeunesse délinquante de hirsute qui brûle ses papiers militaires et justement ces quatre soldats figures emblématiques de l'ordre, de la loi et de la discipline. Pourtant le film n'est pas à proprement parlé porteur de messages et offre même une vision assez nuancée de cette bande motards avec leurs règles et leur hiérarchie qui condamnera sans représailles celui qui aura causé l'accident mortel.
Chrome and Hot Leather reste un chouette petit film d'exploitation suffisamment bien tenu et divertissant pour passer un bon moment .