Prendre ce film pour ce qu’il est sans tenter de le comparer au cinéma d’auteur, qui n’a absolument pas les mêmes prétentions : mission difficile mais pas impossible. Depuis quelques années, par le rachat de franchises et la création de filiales, l’empire Disney ne se contente plus d’envahir les salles de cinéma lors des seules fêtes de fin d’année, aujourd’hui Disney Company est une holding dotée d’une collection printemps-été à laquelle succède la collection automne-hiver.
Parmi ces franchises et autres sagas surnage la fée Clochette (Tinkerbell pour les puristes), exfiltrée de l’univers Peter Pan depuis l’année 2008, qui vit la sortie DVD de La Fée Clochette et la mise en images de synthèse de la naissance de celle qui deviendra l’égérie de Peter, l’enfant qui ne voulait pas grandir. Clochette Et la Créature Légendaire est le septième film à lui être consacré, le troisième à sortir en salles.
Une nouvelle fois, le produit est parfaitement calibré pour enchanter les plus jeunes et surtout les fillettes. Contrairement à d’autres productions Disney, il n’est pas certain cette fois que les parents et accompagnateurs y trouvent leur compte et ce, principalement pour deux raisons qui laisseront les têtes blondes parfaitement indifférentes.
La première raison frappe à la première image: l’animation (DisneyToon Studios ne s’occupait il y a peu que des suites de classiques, destinées exclusivement aux sorties DVD) sans être rébarbative, reste très en–dessous des possibilités actuelles de Disney, studios réputés très performants en la matière, du moins pour certaines filiales. On sent qu’une part de leurs films sortant en cours d’année est sans réels enjeux financiers et sert surtout à garder la marque à l’affiche le plus longtemps possible. Toujours est-il qu’on aurait apprécié plus d’ambition artistique de ce côté-là.
La deuxième raison est le personnage de Clochette lui-même : son traitement depuis qu’elle évolue seule ne peut que laisser sceptique. Peter Pan nous la présentait jalouse jusqu’à la tentative de meurtre, peste à en être malade, colérique et bien évidemment icône sexuelle, aspect très bien exploité par Régis Loisel dans sa série de bandes dessinées. Tout ce qui faisait le sel de Clochette a depuis disparu, il ne reste qu’une petite blonde naïve, maladroite et qui veut le bien général. Exit tout ce qui pourrait paraître négatif ou subversif aux plus jeunes et avec, le côté familial du personnage. Ajoutez-y le fait que dans ce film, elle est réduite à un rôle secondaire et il ne restera que les enfants pour en dire du bien.
Au final, Clochette Et La Créature Légendaire n’est pas réellement une catastrophe, mais ne va pas au-delà du produit de consommation courante et à la morale bien balisée. Bien sûr, il ravira les petites filles (n’oublions pas le casting de voix françaises, véritable usine à sarcasmes…) qui voudront à tout prix se déguiser, qu’elles voient ce film ne sera d’ailleurs pas une catastrophe absolue, mais il risque d’entamer sérieusement leur esprit critique naissant par rapport au Septième Art. Donc Clochette oui, mais point trop n’en faut.