Satanas et Diabolo

Vieux briscard de la série B, Lee Frost s'est frotté a tous les genres que ce soit en tant que scénariste et/ou réalisateur de la bikerspoitation (Chrome and Hot Leather) au fantastique (La Chose à Deux têtes) en passant par la nazisploitation (Le Camp Spécial 7), la blacksploitatrion (Black Gestapo), le porno (Soumise et Perverse Cecile) , le western (Scavengers), le polar (Cette femme est un Flic), le mondo (Mondo Bizarro), le film de femme en prisons (Chan Gang Women) et quelques autres. Avec Race With The Devil pour lequel il sera remplacé au poste de réalisateur par Jack Starret ( Dynamite Jones – Les Machines du Diable), Lee Frost secondé par Wes Bishop signe un scénario dans l'air du temps de ce début des années 70 sur lequel planait l'aura maléfique de Satan (Rosemary's baby - L'Exorciste) et la peur de contrées reculés de l’Amérique dans laquelle sévissait des bouseux peu amicaux et amateurs de cris de cochons (Délivrance) pour un détonnant mélange d'action et de fantastique.

Course Contre l'Enfer raconte l'histoire de deux couples d'amis qui partent en vacances dans un flambant camping car tout neuf. Avec la liberté de pouvoir faire escale là ou ils veulent ils vont se retrouver malencontreusement au mauvais endroit, au mauvais moment. En effet une nuit Roger et Frank surprennent une cérémonie de messe noire durant laquelle une jeune fille est sacrifiée. Repérés dans les adeptes du culte satanique ils se retrouvent pris en chasse et frappé de ce qui pourrait être une malédiction.

Course Contre L'Enfer est une très bonne petite série B carré et efficace produite par la Twentieth Century Fox ce qui lui assure un budget confortable et un casting de premier choix. Même si c'est un peu un standard qui s'imposera plus tard avec l'explosion du slasher, c'est très plaisant de retrouver des personnages qui ont un peu de bouteille et de vécu dans les premiers rôles plutôt que des adolescents ou des jeunes adultes. Le casting de Course contre l'Enfer compte assurément parmi les points forts du film puisque l'on retrouve pour interpréter les deux couples Peter Fonda, Warren Oates, Loretta Swit ( La Série M.A.S.H.) et Lara Parker (La série Dark Shadows). Deux couples crédibles à l'écran et des personnages suffisamment attachants pour que l'on s’inquiète pour leur sort et plutôt raisonnés dans leurs actes pour ne pas sombrer dans l'incohérence. Même lorsque le scénario suggère que l'on pourrait se retrouver face à une secte sataniste célébrant un culte Maya au fin fond du Texas, on a toujours envie d'y croire. Une fois qu'ils ont été les témoins de ce meurtre sacrificielle le film installe un délicieux climat de paranoïa anxiogène (enfin plus pour les personnage que le spectateur) nous conduisant tranquillement vers un final plus porté vers l'action. Entre la police incrédule qui traite l'affaire un peu trop à la légère, les regards insistants et vides des autochtones, les intrusions trop amicales d'inconnus dans le camping car et les véhicules qui semblent les suivre, les deux couples se retrouvent avec l'impression tenace que tout le monde pourrait être complice et contre eux. Une sensation assez bien rendu par la mise en scène de Jack Starret qui alterne tension sourde et séquence plus spectaculaires comme une double attaque de serpents dans l'espace exigu du camping car.

Et puis forcément le film ne pouvait pas s'appeler Course Contre L'Enfer sans se terminer sur les routes brûlante du Texas avec une course poursuite entre nos citadins en camping car et des satanistes texans énervés en bagnole. Alors bien sûr ce n'est pas la folie furieuse de Mad Max et Jack Starret n'a pas la maestria de George Miller mais ça reste tout de même diablement efficace et tendu avec cascades et tôles froissés. Si certaines cascades semblent un peu hors sujet et limite comique comme ce type qui roule pendant des plombes sur deux roues façon Remy Julienne dans une vieille comédie française des années 70, on a aussi Peter Fonda qui démastique du sataniste au fusil à pompe debout sur son camping avec Warren Oates au volant la mâchoire serrée, et là ça le fait carrément plus.

Course Contre l'Enfer est vraiment une très bonne série B qui propose un spectacle tendu et tenu de bout en bout jusqu'à un final délicieusement sombre et flippant. Cette assez improbable mélange de Rosemary's Baby, Delivrance et Mad Max mérite assurément d'être réhabilité.