Compte de faits.
Lorsqu’on explore les différents documentaires proposés sur une même période, en l’occurrence la deuxième guerre mondiale, vue par Lanzman dans Shoah en 1985 ou Ophüls dans Le Chagrin et la Pitié en...
le 16 oct. 2020
12 j'aime
Lorsqu’on explore les différents documentaires proposés sur une même période, en l’occurrence la deuxième guerre mondiale, vue par Lanzman dans Shoah en 1985 ou Ophüls dans Le Chagrin et la Pitié en 1971, le visionnage d’un film comme celui de Roissif peut s’avérer troublant. Après les partis pris radicaux de l’un, dénué de toute image d’archive, ou l’angle d’attaque de l’autre, se concentrant sur une ville et allant chercher les témoignages les plus diversifiés, le travail présenté ici devient l’archétype d’un certain classicisme devenu presque hors compétition.
Tout, effectivement, est construit de manière à remplir les fonctions premières du documentaire : traiter, trier, compiler, synthétiser l’information pour la rendre digeste, dans une approche didactique dont l’obsession première sera l’efficacité.
Et force est de reconnaitre que celle-ci est au rendez-vous. De Nuremberg à Nuremberg est avant tout un formidable travail d’archives, puisque les trois heures du film se résument à un montage de ce tout ce que l’époque a pu produire en prises de vues, qu’il s’agisse de propagande (les fameuses premières images de Nuremberg filmées par Riefenstahl), de reportage de guerre ou d’images du procès saisies pour la postérité.
Le bout-à-bout permet parfaitement de saisir l’ascension du régime Nazi, l’impuissance incrédule des voisins européens, l’inefficacité de la SDN et la facilité avec laquelle la conquête se met en branle avant de prendre des proportions globales par les actions simultanées de l’Axe.
La méthode, très pédagogique, use de tous les ressorts : un narrateur en voix off, commençant chacune de ses phrases par la date, verbalisant les enjeux, les noms propres ou les chiffres, le recours à des cartes et un habillage musical de Vangelis pour accompagner quelques séquences particulièrement spectaculaires.
A la différence des autres monuments sur le sujet, le déroulé se veut surtout factuel. Aucune intervention d’historien ou de témoin, pas de place au ressenti ou aux analyses. Il s’agit, au sens strict, d’un récit sur l’ascension et la décadence d’un Empire qui, en 12 ans, dévaste la planète et exploite toutes les innovations humaines au profit de la destruction de masse. Ce ton résolument neutre est probablement à mettre en parallèle avec l’aboutissement du récit, à savoir le procès. Un regard qui se voudrait impartial pour pouvoir juger, et qui réserve pour la fin, face aux accusés, les images les plus terribles du Ghetto de Varsovie ou des camps d’extermination.
« J’ai conçu ce film pour réveiller les mémoires », a déclaré Frédéric Roissif. Une initiative nécessaire, si l’on en juge par les réticences de la télévision française, qui mis deux ans avant de le diffuser, arguant le désintérêt des téléspectateurs pour les nazis et les risques de confusion avec la campagne présidentielle de 88 dans laquelle était engagée l’extrême droite. Un regard frontal sur le passé dans l’espoir que de nouvelles archives d’un tel ordre ne se créent plus à l’avenir.
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Documentaire, Les meilleurs films sur la Seconde Guerre mondiale, Les meilleurs documentaires historiques, Les meilleurs films de 1989 et Vu en 2020
Créée
le 16 oct. 2020
Critique lue 561 fois
12 j'aime
D'autres avis sur De Nuremberg à Nuremberg
Lorsqu’on explore les différents documentaires proposés sur une même période, en l’occurrence la deuxième guerre mondiale, vue par Lanzman dans Shoah en 1985 ou Ophüls dans Le Chagrin et la Pitié en...
le 16 oct. 2020
12 j'aime
De Nuremberg à Nuremberg est un magnifique documentaire réalisé par Frédéric Rossif... sur le régime nazi, qui commence par les rassemblements de masse nazis à partir de 1933 à Nuremberg... et qui se...
Par
le 9 août 2015
3 j'aime
"De Nuremberg à Nuremberg" est un documentaire télévisé réalisé par Frédéric Rossif, diffusé en 1989 à l'occasion du 50e anniversaire du procès de Nuremberg. Ce film retrace l'histoire de la période...
le 14 mars 2023
2 j'aime
Du même critique
Cantine d’EuropaCorp, dans la file le long du buffet à volonté. Et donc, il prend sa bagnole, se venge et les descend tous. - D’accord, Luc. Je lance la production. On a de toute façon l’accord...
le 6 déc. 2014
774 j'aime
107
Il y a là un savoureux paradoxe : le film le plus attendu de l’année, pierre angulaire de la production 2019 et climax du dernier Festival de Cannes, est un chant nostalgique d’une singulière...
le 14 août 2019
715 j'aime
55
La lumière qui baigne la majorité des plans de Her est rassurante. Les intérieurs sont clairs, les dégagements spacieux. Les écrans vastes et discrets, intégrés dans un mobilier pastel. Plus de...
le 30 mars 2014
618 j'aime
53