Après les gardiens de la galaxie, Marvel, nous refait le coup du Walkman, cette petite touche de nostalgie, pour faire du neuf avec du vieux, ode à la hype du mec cool qui met en pièce ses adversaires ou qui embrasse sa dulcinée sous de la musique 80’s. C’est d’une originalité…Nouveau et dernier poulain en date de l’écurie Marvel, Deadpool arrive sur nos écrans pour tout casser mais se viande et rate le coche de façon presque trop évidente. Depuis plusieurs années maintenant, DC Comics et Marvel se livre un combat sans répit pour nous goinfrer de super héros. Pour se différencier, les deux firmes ont choisi d’inscrire leurs longs métrages dans deux tonalités opposées. D’un côté, vous avez le sérieux, le charisme sombre voire ampoulé de DC Comics emmené par son duo Nolan/Snyder, et de l’autre, vous avez l’esprit ricanant de Marvel, un humour auto référencé qui fait fortune au box-office avec Iron Man, les Avengers, et dernièrement, les gardiens de la Galaxie.


Sauf qu’avec Deadpool, énième pur produit marketing, Marvel décide de conduire son autodérision dans le fauteuil de la flagornerie méta. D’ailleurs le générique, nous le dit clairement, le film est réalisé et joué par des tacherons. Au moins, il n’y a pas erreur sur la marchandise, même si c’est pour la blague. Car, oui, Deadpool, le film, autant que son personnage, assume tout, se cachant derrière une multitude de références, de renvois filmiques, de clins d’œil aux spectateurs, de punchline pop à n’en plus finir, qui se rapprochent plus de la veine d’un Cyril Hanouna que d’un Tarantino.


Comme Hollywood a du mal à réinventer son stock de super-héros, Deadpool est présenté comme l'avènement d'une nouvelle génération: le super héros conscient de son statut d'outsider à la fois dans le monde qu'il habite et dans le comic-book Hollywoodien au sens large. L’acteur, Ryan Reynolds qui a le mérite de se battre pour son personnage et de faire le job, s’amuse lui-même de son image de beau gosse et de son talent d’acteur, notamment dans Green Lantern. Mais ça ne suffit pas, pour obtenir la rédemption tant attendue et secouer la mythologie cinématographique des hommes en collant.


Être conscient de ses lacunes, c’est une chose, mais en faire une qualité, c’est une erreur. Le premier film de Tim Miller se termine finalement comme un ersatz cinématographique de plus qui nous rappelle toutes les deux minutes que le film est de l’écurie Marvel, avec cette histoire d'origine monotone et sclérosé par l’archétype Marvel (et cette transformation à la Wolverine). Wade Wilson est un sociopathe et c’est dommage que Deadpool n’aille pas au bout de son idée, et s’oblige à sortir les violons dans des moments d’émotions assez ridicules dans un film qui se veut l’inverse. Rire de soi, se désolidariser d’une mouvance ostentatoire, démystifier l’aura pompeuse des super héros, c’est l’esprit d’un film, qui à travers son protagoniste, nage entre deux eaux ou a le cul entre deux chaises : faire un film de super héros ou ne pas être un film de super héros. Et c’est cela le souci, à l’image de cette romance qui symbolise l’imposture du film : on passe du god-ceinture potache amusant qui se défait du stéréotype du male alpha, aux scènes lacrymales habituelles lors de l’annonce du cancer ou des retrouvailles de fin où le physique ne comptera plus, où l’amour triomphera. Une contradiction.


De ce point de vu là, Deadpool, ou Wade Wilson, est un mercenaire au passé accablant, qui menace des ados pré pubères, et qui se voit diagnostiquer un cancer et essaye de sauver sa vie grâce à une clinique clandestine mais ça foire et son corps crame. Sauf qu’il veut se venger et retrouver son apparence d’avant pour reconquérir sa belle. Mais le grand méchant, Francis, a compris l’astuce et kidnappe la fiancée de Deadpool pour l’attirer dans un piège. Le conformisme de l’anticonformisme, une posture purement communicative, une sorte d’effet Kingsman, où il est de bon ton de suivre le pas de la parodie, qui empêche toute empathie voire toute croyance en la sincérité véritable du projet, avec l’aide de quelques touches gores et vannes prout prout, pour se réapproprier le cinéma de genre.


C’est un secret de polichinelle, Deadpool, super héros masqué, est loin d’un Rorschach, de son nihilisme, de cette solitude haineuse ; Deadpool n’a pas l’humour noir d’un Ben de C’est arrivé près de chez vous ni la folie sanguinaire enfantine de Hit Girl de Kick Ass, ni la joie suicidaire touchante de Frank de Super de James Gunn, ni l’indépendance geek d’un Scott Pilgrim. Il n’est qu’un simple produit de plus, de Marvel, un faux anti héros, qui rentrera dans le rang, pour sauver l’humanité.


S’inscrivant dans une veine moins pragmatique et plus humaine du super héros, qui ne surjoue jamais le trauma, Deadpool a quelques cartes dans sa manche pour plaire, comme son intro décomplexée et jouissive, son esprit popcorn non dissimulé, son côté anti spectaculaire efficace, mais dans cette connivence, Deadpool ne dépareillera en rien dans la pauvreté d’écriture narrative Marvel, avec ses bad guys navrants (Francis qui est un sosie de Jay Courtney avec encore moins de charisme), ses super héros de pacotille (Colossus et son discours moralisateur sur les super héros qui ne sert que de running gag grossier à la fausse irrévérence de Deadpool), ses personnages secondaires qui ne servent que de faire valoir humoristique (le néanmoins assez drôle taxi indien), cette mise en scène qui manque clairement de souffle, et sa photographie d’une laideur low cost assez confondante.

Velvetman
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le 17 févr. 2016

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Velvetman

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