Après le très chabrolien La Tourneuse de Pages, Denis Dercourt revient avec Demain dès l'aube, un film audacieux, étrange, surprenant, qui montre que le cinéma français peut faire preuve d'originalité quand il le souhaite.
Mathieu (Vincent Pérez), un pianiste réputé, décide de vivre quelques jours avec son frère, Paul (Jérémie Rénier), un passionné de jeux de rôles, qui revit les batailles historiques. Mathieu décide d'accompagner son frère à son jeu, et plonge lui aussi dans cet univers ou la frontière entre le réel et le virtuel est assez mince.
L'ombre de Chabrol plane encore une fois sur ce film : ambiance froide et mystérieuse, rythme lent, silences pesants, personnages troubles et ambigus, intrigue perverse, jeu d'acteur atone, etc... Sauf qu'au lieu de nous proposer un polar provincial (ce qui était un peu le cas de La Tourneuse de Pages), Dercourt nous invite cette fois-ci dans un voyage dans le temps, passionnant et envoûtant, qui brouille les pistes et oscille entre drame contemporain et film d'époque.
Outre son originalité et son lot de surprises, le gros point fort du film est son casting : Vincent Perez et Jérémie Rénier nous offre une partition (c'est le cas de le dire ) sans fausse note. Pérez, longtemps catalogué "acteur de films d'époque", s'auto-pastiche dans ce rôle de musicien un peu naïf qui découvre l'époque napoléonienne, tandis que Jérémie Rénier apporte beaucoup d'ambiguïté à son personnage.
Dommage que Dercourt n'étoffe pas assez son récit, et délaisse en cours de route certains aspects de l'intrigue. la relation entre le triangle Mathieu-sa femme-son fils aurait du être mis en relief davantage. De plus, certains personnages du film ne sont qu'esquissés, comme s'ils manquaient de profondeur.