The Social Dilemma est pris d’une manie d’autant plus dommageable qu’elle répète et applique ce qu’elle prétend dénoncer : soit le formatage de la pensée par une série de poses et d’attitudes qui attirent le regard, changent les intervenants en pantins s’agitant dans l’ombre d’un Steve Jobs avec leurs grands discours, leurs silences construits, leurs fausses hésitations. Le documentaire échoue totalement à saisir la spontanéité d’un échange, la sincérité d’une confession, enchaîne pendant plus d’une heure et demie des réflexions intéressantes mais trop fermes sur des sujets instables, insaisissables et évanescents. De plus, la reconstitution par la fiction d’une famille type s’insère mal dans le dispositif mis en place par le film, trop algorithmique et schématique pour espérer toucher le spectateur. Ça parle de trop haut et trop fort, comme si les intervenants, forts de leur expérience dans l’Enfer d’internet, en étaient sortis ailés et auréolés de sainteté. Rien ne vaut, à sujet égal, un documentaire signé Arte qui sait conjuguer rigueur de l’analyse, modestie et dynamisme.