Qu’est-ce que j’peux faire ? j’sais pas quoi faire.

Kana, 21 ans, s’emmerde. Au début du film, elle vit avec Honda, un garçon attentionné. Eh bien ça l’emmerde. Elle le quitte alors (de manière assez basse) pour vivre avec Hayashi, jeune homme dont elle semble être tombée amoureuse. Au début, ça va, mais là aussi, ça finit par l’emmerder. Elle décide alors de se mettre un piercing dans le pif et c’est le moment où c’est le spectateur qui va sérieusement commencer à s’emmerder…



Depuis quelque temps, j’ai pas mal donné concernant les films japonais faisant le portrait de femmes torturées et, je dois le dire, pour mon plus grand plaisir tant les films parvenaient à rendre les affres aussi touchantes et captivantes. Et parmi ces films, il y avait A Girl named Ann dans lequel jouait Yumi Kawai, rôle qui, associé à son travail pour ce Desert of Namibia, lui a permis d’obtenir le titre de la meilleure actrice aux dernières récompenses de Kinema Junpo. En soit rien de scandaleux, la jeune actrice sait jouer, prend des risques dans ses rôles, c’est mérité.


Mais là… comment dire ? Au début, je me suis dit que le film allait suivre une trajectoire à la Millennium Mambo, avec une jeunesse insouciante, un peu camée, passant ses soirées en boîte. Bon, pourquoi pas ? Le gros souci est que Kana n’est pas Vicky, le personnage de Shu Qi. Kana s’efforce d’avoir une vie normale, avec un métier, des amis, un petit copain, mais on comprend que tout cela est une manière confuse de remplir son vide intérieur. Car oui, Kana est vide (en plus d’être bipolaire). Quand son copain lui propose de mater un film pour faire passer le temps, elle répond : « À quoi ça sert de regarder un film ? » Là, j’avoue que c’est le moment où j’ai commencé à me déconnecter de l’histoire (j’ai été gentil, j’ai laissé passer une bonne heure) tout en me disant : « À quoi ça sert de regarder ce film jusqu’au bout ? »


J’entends bien qu’il n’est pas obligatoire d’éprouver de la sympathie envers un personnage pour être malgré tout intéressé par sa trajectoire. Mais avec un électrocardiogramme aussi plat (et je pense aussi que voir des Tora-san, où le moindre sentiment a tout de suite une relief particulier, n’arrange rien) concernant les personnages, une absence de clés expliquant pourquoi Kana est comme ça (Yamanaka saupoudre des hypothèses mais rien de sûr ; alors elle peut choisir de faire ainsi bien sûr, mais comme on se farcit 90% de temps un faciès tellement terne qu’il en devient antipathique, on n’a pas spécialement envie de se creuser les méninges pour comprendre le pourquoi du comment), on ne ressent aucune connexion, aucune curiosité. Et quand les scènes de folie furieuse arrivent, rien ne change : on regarde sans la moindre gêne, sans empathie, même pas avec agacement, les séances d’échanges de coups entre les deux personnages dans leur appartement. Yamanaka réussit l’exploit de vider aussi l’esprit de son spectateur.


Bref une grosse déception, déception qui du coup me refroidit pour voir le film précédent, Amiko. Je le tenterai quand même car apparemment il y a un peu d’humour (inutile de préciser que cet ingrédient est absent de Desert of Namibia)


Et pour ce qui est de voir un film récent sur une femme mal dans sa peau et son esprit, mieux vaut voir Yumi Kawai dans A Girl named Ann ou le magnifique 658km Yoko no tabi, avec Rinko Kikuchi (qui aurait tout autant mérité d’avoir la récompense de Kinema Junpo).


plus de critiques ciné japonais sur bullesdejapon.fr

Créée

il y a 5 jours

Critique lue 4 fois

Critique lue 4 fois

D'autres avis sur Desert of Namibia

Desert of Namibia
Electron
6

Désert affectif

Étrange film, présenté à la Quinzaine des cinéastes du festival de Cannes 2024, dont la durée (2h17) ne se justifie jamais et qui se clôt par une scène qui illustre son titre de manière énigmatique...

le 11 nov. 2024

3 j'aime

Desert of Namibia
Cinephile-doux
4

Fièvre erratique

Les meilleurs moments de Desert of Namibia ? Sans aucun doute, les images de son générique de fin, apaisées et silencieuses, lesquelles, de surcroît, justifient le titre abscons du long métrage de...

le 24 nov. 2024

1 j'aime

Desert of Namibia
Fabrice-del-Dongo
4

Qu’est-ce que j’peux faire ? j’sais pas quoi faire.

Kana, 21 ans, s’emmerde. Au début du film, elle vit avec Honda, un garçon attentionné. Eh bien ça l’emmerde. Elle le quitte alors (de manière assez basse) pour vivre avec Hayashi, jeune homme dont...

il y a 5 jours

Du même critique

Sanctuary
Fabrice-del-Dongo
9

Le rebelle apprivoisé

Suivant autrefois avec attention le moindre basho, Je dois avouer que j’ai un peu lâché l’affaire concernant le sumo. La faute à une ère sans yokozunas et des lutteurs Japonais qui manquent de...

le 8 mai 2023

15 j'aime

2

Le mal n'existe pas
Fabrice-del-Dongo
9

Le Mal n'existe pas (mais le diable est dans les détails)

Après la claque Drive My Car, j’étais prêt à tendre l’autre joue pour m’en prendre une deuxième car depuis Asako I & II, j’avoue faire partie de ceux qui voient en Ryusuke Hamaguchi, 45 ans...

le 15 avr. 2024

8 j'aime

1