Il n'y qu'Alain Chabat pour nous pondre un film au scénario si tordu, il n'y a qu'Alain Chabat et aucun autre réalisateur pour nous offrir une comédie aux gags si bien trouvés. Après le culte « La cité de la peur », véritable ode à la parodie cinématographique, l’ancien Nul s’essayait à la réalisation en 1997 dans une comédie qui avait du chien : Didier. Retour dans le passé, plongez dans la routine de Jean-Pierre Bacri face à son labrador devenu homme.
Alain Chabat, ce génie de la comédie
Découvert au cinéma à l'âge de 12 ans, revu des tonnes et des tonnes de fois en VHS puis à la télévision, tombé totalement fan de l'histoire et d'Alain Chabat, Didier, si vous voulez vous tordre de rire en voyant un mec se comporter comme un chien, c'est LA comédie à voir. Concept exploité parfaitement. Les bouclettes noires, les mimiques, la gestuelle, les expressions, le dialecte, ce regard canin si innocent (comment il a fait ? Je ne sais toujours pas), Chabat entre dans son personnage, imitant au millimètre près les mouvements et la routine d’un chien domestique.
Vous vouliez savoir ce que ça donnerait si un chien se retrouvait du jour au lendemain dans la peau d’un humain ? Didier vous l’illustre. Sensibilité aux bruits, marquage de territoire, trois tour sur soi-même pour s’asseoir afin de s’assurer que le lieu est sûr, reniflage de fesses, désobéissance (pour les chiens mal éduqués), nettoyage de gamelle même s’il ne reste plus de croquettes, grognements, soupirs, protection du maitre, sauts de joie, grattage à la porte pour rentrer, ect. Du génie, aussi invraisemblable que ça puisse paraitre, on y croit, jusqu’à éprouver de l’attachement pour ce maitre et cet homme-chien.
Rien n’est oublié, on arrive même autour à développer une histoire de football et d’amourette. Jean Pierre Bacri quant à lui, que dire ? Râleur comme pas permis, grande gueule, l’acteur déborde de charisme, se glisse parfaitement dans son personnage du Parisien grincheux et aigri, se prenant le chou sur l’autoroute en plein bouchons.
Je, je, je, je, je sais pas, j’comprends pas... Comment tu veux
expliquer ça ? Un jour t’es un chien, le lendemain t’es un homme. Je
crois même pas ce que je viens de dire... La seule explication, c’est,
c’est comme les trucs bouddhistes, c’est une réincarnation euh mais
euh en super-accéléré ou, ou les univers parallèles, non, j’en sais
rien et puis tu sais, on sait pas tout hein, les hommes ils savent pas
tout, on sait des trucs mais c’est... On sait pas tout.
C’est moi ou ça sent le chien mouillé ?
En plus de devoir gérer son boulot, Jean-Pierre va devoir apprendre à Didier à se comporter comme un humain. Aller aux toilettes, faire pipi debout, caca assis, utiliser le papier WC, manger à table proprement, s’habiller, apprendre à parler, et ne SURTOUT PAS renifler le postérieur des gens. En gros, Didier doit dorénavant oublier qu’il est un chien.
Quant il s’aperçoit que Didier a des talents de footballeur, Jean-Pierre voit de l’or en barres, ment sur la véritable identité de son chien en prétextant qu’il vient de Lituanie et propose à son patron de l’intégrer dans son équipe de foot. Nous on jubile, impatients de voir Didier chausser le crampon et taper du ballon sur un terrain.
Jeux de mots, comique de situation, guests de choix (Josiane Balasko, Dominique Farrugia, Chantal Lauby), effets spéciaux bien foutus, mise en scène soignée, Didier rivalise avec les plus grandes comédies américaines, allant jusqu’à faire apprécier le foot aux non footeux. Lionel Abelanski en meilleur ami de Jean-Pierre aussi simplet qu'attachant, Isabelle Gélinas en ex petite amie au sale caractère, Zinedine Soualem en entraineur impulsif, Jean-Pierre Frin en pseudo mafieux patron d'une équipe de foot, le casting est à l’image du film, délectable, hilarant.
Quant à la bande originale, fun, elle colle à l’ambiance canine de Didier sans jamais nous faire tomber dans un film de beaufs. On n’oublie pas pour autant le groupe de hooligans skinhead, fans de metal Allemand, dont Didier ne porte pas vraiment dans son cœur. Parce que oui, Didier a beau être drôle, il critique le monde du football où il est plus question d’argent que de sport, et le comportement puéril de certains « supporters ».
Dis donc, t'es quand même un peu gonflé de lui parler comme ça? Quoi?
Tu lui parles comme à un chien. T'as du pot qu'il soit sympa, moi à sa
place je t'aurais foutu ma main dans la gueule.
Même aux chiens on leur parle mieux.
Ba c'est un chien, voila.
T'es dégueulasse. C'est ça un étranger pour toi? Et même s'il est
Polonais on parle pas aux gens comme ça!
Au final, à ceux qui disaient que les réalisateurs et scénaristes Français n’étaient pas capables de sortir des comédies originales, voyez Didier. Pas d'humour malsain, pas d'humour noir, pas de satirique, tout simplement du comique de situation avec ces gags recherchés, ces répliques cultes, son duo aussi tordant qu'attachant pour un Alain Chabat au sommet de son art. Surréaliste, ce film est surréaliste mais ça reste du cinéma, ça reste une comédie aux allures de conte pour enfants à voir et à revoir pour apprendre les répliques par cœur. Du pur bonheur, un César largement mérité. Merci Alain !