Donne-moi des ailes aurait pu n’être qu’un mauvais film de plus, dégoulinant de bons sentiments et de mièvrerie écologique bon marché. Mais il est bien pire que cela : c’est un monument d’hypocrisie, un concentré de cette posture typique du "vieux monde", celui qui détruit le vivant tout en se regardant dans la glace avec émotion parce qu’il pense faire « sa part ».
En 2018, pendant le tournage de ce film censé célébrer la beauté de la nature et la relation poétique entre l’homme et les oiseaux, la production a survolé à basse altitude une colonie de flamants roses en pleine nidification. Résultat ? 520 œufs détruits. 520 vies envolées, littéralement piétinées dans la panique provoquée par le vacarme des ULM. 11,5 % de la reproduction annuelle des flamants roses en France réduite à néant. Tout cela pour quelques plans "émouvants" destinés à un public qui ne verra jamais l’envers du décor.
Ce drame écologique n’est pas un simple accident, c’est le symptôme d’un mal plus profond : celui de cette génération incapable de rester en place, de ne pas se mêler de tout, de ne pas tout instrumentaliser, même ce qu’elle prétend aimer. Nicolas Vanier, emblème de cette agitation stérile et destructrice, incarne parfaitement cette contradiction : célébrer la nature tout en la massacrant. Il filme des oiseaux en voie de disparition… en mettant leur survie en péril. Il s'émerveille des paysages sauvages tout en les foulant du pied avec l’arrogance de ceux qui pensent que le message justifie tous les moyens.
Et que répond le réalisateur ? Qu’il est victime. Que seuls les pilotes sont responsables. Autrement dit, il refuse d’assumer, de se remettre en question. Comme tant d’autres avant lui, il se défausse, déplore la sévérité de la justice et continue son chemin comme si de rien n’était, drapé dans sa prétendue bonne foi. Et c’est bien là le problème : ce monde-là ne se remettra jamais en question. Il continuera à s’agiter, à voler, à tourner, à produire, à « sensibiliser » en détruisant, incapable d’admettre que la meilleure chose à faire parfois… est de ne rien faire.
Donne-moi des ailes n’est pas un film écologique. C’est une fable toxique. Un conte mensonger, fabriqué à coups de moteurs à essence, de perturbations écologiques et d’irresponsabilité crasse. C’est le chant du cygne d’une époque incapable d’enfin se taire, de poser ses outils, de respecter la vie sans la mettre en scène.
La Camargue a payé le prix fort pour ce film. Les flamants roses, eux, n’avaient rien demandé.