Édouard, mon fils par Maqroll
Jusqu’où un père peut-il aller pour son enfant ? C’est la question posée dans cette satire vitriolée de la société libérale signée Cukor, une de plus, pourrait-on dire… Les originalités de celle-ci : Spencer Tracy dans un rôle pour le moins équivoque pour ne pas dire franchement antipathique et l’absence « à l’Arlésienne » du personnage titre dont le nom est sur toutes les lèvres du début à la fin mais qu’on ne voit jamais. Pour la seconde, Cukor nous avait fait un coup du même style dix ans plus tôt avec Women, où pas un homme n’était présent à l’écran, produisant ainsi une impression étouffante de monde irréel… Pour la première, Spencer Tracy confirme qu’il est un des plus grands acteurs de tous les temps et qu’il est capable de jouer les pères de famille comme les infâmes salauds avec autant de bonheur… en combinant ici les deux ! Le film est bien construit (presque trop bien, dans une perfection formelle un peu rigide), avec un très bon rendu du temps qui passe et la conclusion, bien que moralisante, est tout de même bien amère pour celui qui a tout perdu. À signaler pour finir l’exceptionnelle performance d’actrice de Deborah Kerr, lumineuse comme à son habitude au début du film, qui subit peu à peu l’usure du temps et de la boisson, cassant complètement son image et terminant par une ultime tirade désespérée où elle laisse éclater son formidable talent.