Sacré Sam Mendes. Discrètement, ce réalisateur est en train de se construire une filmographie exceptionnelle, car très hétérogène (à l'image d'un Kubrick), mais qui fait toujours mouche (à l'image d'un Kubrick). Après avoir réalisé deux James Bond, puis l'un des plus grands films de guerre de l'histoire avec 1917, Sam Mendes s'attaque dans Empire of Light à la romance. Et encore une fois, il nous offre une formidable séance de cinéma.

La principale qualité du film est indéniablement son rendu visuel. Beaucoup d'éléments y contribuent : la réalisation fantastique et polyvalente de Sam Mendes, la photographie sublimissime de Roger Deakins (qui était aussi en charge de la photo de Blade-Runner 2049 ou Sicario, c'est dire), mais aussi les décors, et en particulier ce cinéma d'époque magnifique, dans lequel se déroule la plus grande partie de l'histoire. Empire of Light est un plaisir total pour les yeux, sans discontinuer, avec des jeux de lumière exceptionnels, des plans aussi géniaux qu'ingénieux, et encore une fois des décors magiques. Pour ce qui est de l'histoire, celle-ci a ses grandes forces, et ses quelques faiblesses. Les personnages mis en scène touchent immanquablement le spectateur, et ce à la fois grâce à la belle histoire qu'on nous raconte, mais aussi grâce au talent infini d'Olivia Colman, sans oublier la performance particulièrement prometteuse de Micheal Ward. Difficile de ne pas être embarqué émotionnellement par cette histoire et par ces personnages, qui chacun, traversent leurs problèmes spécifiques (santé fragile pour l'une, violences racistes quasi-quotidiennes subies par l'autre). La réunion de Hilary et Stephen est cohérente, bien amenée, et évolue avec beaucoup de justesse. Malgré tout, Empire of Light traîte énormément de thèmes très profonds, et semble s'éparpiller entre temps, de sorte qu'il ne finit par ne traiter certains qu'en surface. De même, certaines scènes ne sont pas suffisamment travaillées d'un point de vue scénaristique d'après moi, mais heureusement elles sont rares.

Empire of Light tire pour moi son caractère d'excellent film de la cohérence entre ce que le spectateur voit, entend, et ressent. Ainsi, en plus de la beauté visuelle du film, la bande-son et l'histoire finissent par procurer au spectateur un apaisement, une forme de caresse émotionnelle. Empire of Light est comme un poème qu'on lit devant un coucher de soleil, il nous laisse à sa fin avec une douce et agréable mélancolie, il nous offre un nouveau regard sur la vie et son indéniable beauté, un regard plus indulgent, plus sincère.

Sam Mendes profite enfin de ce film pour rendre son hommage au cinéma, et à la salle de cinéma. Après Damien Chazelle dans Babylon, puis Steven Spielberg dans The Fabelmans, au tour de Sam Mendes de rappeler au monde l'immortalité et la magie de ce lieu, ce lieu qui rassemble, tant physiquement qu'émotionnellement, des gens qui ne se connaissent pas et ne se connaîtront jamais. Ces gens qui ne se croiseront que là, dans cette salle obscure, dans laquelle règne pourtant la plus brillante des lumières : celle d'un long-métrage.

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le 12 mars 2023

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