Après Le Gang des Antillais, Jean-Claude Barny revient avec Fanon, biopic de conscience politique où la psychiatrie rencontre l’anticolonialisme.
Difficile, en tant que critique, de rédiger un article sur un film découvert dans des conditions particulières. Dans mon cas, ce fût une projection presse des plus inédites ; baignée dans des effluves de tabac froid pendant deux heures, dans une salle où l’architecte a jugé bon de placer l’écran en haut du mur ; sans oublier les deux journalistes, au premier rang, qui se sont disputés à voix haute en plein milieu de la séance. Ambiance.
Le film mérite mieux. Jean-Claude Barny y narre comment un tournant clinique s’est accompagné d’un tournant politique, au cœur de la guerre d’Algérie. La pensée anticoloniale se dynamise dans ce film à la plastique et la mise en scène impeccables.
Dialectique du médecin et du patient
Vous connaissez peut-être Frantz Fanon (ici interprété par Alexandre Bouyer) pour ses travaux en tant que psychiatre, ou bien pour ses essais anticoloniaux (Peau noire, masques blancs, Les damnés de la terre). Jean-Claude Barny, comme son protagoniste, montre qu’il n’est pas suffisant de tracer un simple parallèle entre le clinique et le politique. Soigner le patient doit passer par un changement de regard du psychiatre sur lui. Par la même, la décolonisation doit passer un changement de regard du Blanc sur le Noir.
Le film voit alterner deux types de décor. D’un côté, l’hôpital psychiatrique et ses cloisons ; de l’autre, les paysages nus et vastes de la région nord-africaine. Mais dans ces deux espaces, qu’opposent la profondeur de champ ou l’étroitesse du cadre, la même violence s’observe et s’exerce. Des murs au blanc métaphoriquement agressif du service psychiatrique, à l’armée française qui traque explicitement les opposants politiques, les mêmes schémas de domination sont en jeu.
La réussite de Barny tient surtout au fait qu’il ne se contente pas de décrire la pensée de Fanon dans les dialogues. Il l’intègre dans la mise en scène elle-même. Les deux mondes, clinique et politique, se croisent, et se nourrissent de leurs propres enjeux et influences.
Lire la suite de la critique de Marie sur https://cineverse.fr/fanon-de-jean-claude-barny-avis-critique/