(Critique flash V1.4)
J'ai regardé Fievel et le Trésor perdu en m'attendant à une suite petit budget niaise et limite colonialiste, la faute à une bande-annonce américaine trop courte et concentrée sur de mauvais aspects.
Et en fait le film dit carrément que les patrons de la fabrique où le père de Fievel Souriskevitch travaille sont des parasites maltraitant les ouvriers en les faisant trimer trop dur mais en ne partageant pas équitablement les bénéfices (y a qu'à voir avec Tony qui perd une semaine de paie pour 20 minutes de retard).
On met aussi en scène une police corrompue travaillant pour les industriels et tapant même les ouvriers appelant à la modération (car voyant des "agitateurs" partout).
On est donc encore loin du "rêve américain" promis dans les films précédents, qui montraient déjà que ce rêve est souvent gâché par les antisémites et les mafieux dans Fievel et le Nouveau Monde et Fievel au Far West. Pendant qu'on y est, cet épisode se veut être plus ou une moins une suite directe du 1er film :
Ils sous-entendent que Fievel au Far West n'était qu'un rêve, d'autant que Tanya passe de petite à grande puis à nouveau à petite sœur.
Fievel : J'ai rêvé qu'on était au Far West et que je me battais contre des bandits !
Tanya : Toi ? Ça m'étonnerais, ha ha ha !
(Le film est d'ailleurs moins sympathique envers Tanya, carrément en mode "TG!" après l'avoir laissée briller dans l'opus précédent.)
Tandis que les souris amérindiennes de la Tribu Lenape sont loin de tous les clichés sur les "Peaux Rouges" : ils ont un langage aussi sophistiqué que celui des souris occidentales, ne sont pas habillés que de plumes et peaux de bêtes et ne font pas "Ugh !" à tout va. Les Lenape et leur chef Wulisso expliquent qu'ils se sont réfugiés sous Manhattan pour échapper au sort funeste vécu par les Amérindiens et causés par "les hommes venus d'Europe" venus voler leurs richesses.
Fievel et compagnie se lient aussi d'amitié avec la Lenape Cholena, qui leur apprend l'histoire de leur tribu et leur permet de relativiser la situation.
Et c'est dans ce contexte que Fievel et ses amis Tony et Tiger voulaient chercher un trésor pour devenir riche, mais ils comprennent vite qu'il n'y a pas d'or mais que leur aventure revenait à voler les richesses des Lenape tels les colons autrefois.
Si c'est ça le rêve américain, alors je n'en veux pas !
Après, c'est maladroitement dit, un peu comme au début où le père pique une colère en étant épuisé par son travail et que sa fille Tanya fait une scène comme s'il "ne l'aimait plus". Mais ces stades sont vite dépassés et le 3e film de la saga devient plus sérieux en dénonçant le racisme et l'exploitation des ouvriers par les patrons véreux.
Comme dans les années 90-2000, les méchants sont les patrons exploiteurs et autres autoritaristes. Les patrons finissent même par inciter aux émeutes racistes en envoyant des gens (manipulés par de faux appels à la "défense de la civilisation et de la patrie") et des policiers contre les souris amérindiennes pour faire diversion et conserver leurs privilèges, car leurs ouvriers commençaient à se révolter.
C'est limite si Fievel devient pas anarchiste révolutionnaire à force de se défendre contre des flics ripoux et xénophobes qui vont jusqu'à frapper des mômes.
À noter aussi que, à part Tiger, il n'y a pas de chats qui oppriment nos souris, seulement d'autres rongeurs congénères qui font souffrir leurs propres "compatriotes" pour leurs intérêts personnels.
Après, pour en revenir vite à la forme : le style de dessin est plus lisse mais reste correct (même si on est loin de la patte des studios de Don Bluth ou de Steven Spielberg). Les chansons sont toutefois dispensables (surtout celle du début, sauf celle des patrons qui décrit bien le projet des exploiteurs de toutes espèces), et la musique pourra sembler inutilement épique au début, plus quelques niaiseries déjà indiquées plus haut (et enfin, le fait que la question amérindienne est presque secondaire voire tertiaire, vaguement liée à la condition ouvrière).
Mais le message politique véhiculé sauve le tout, surtout quand le père Souriskevitch devient "négociateur", sous-entendu représentant syndical, quand lui et ses camarades sont inspirés par Fievel et ses amis pour tenir tête aux patrons et à leur projet faussement patriote une bonne fois pour toutes :
Nous sommes tous des étrangers venus en Amérique chercher l'espoir d'une vie meilleure.
Bref, pas le meilleur Fievel mais toutefois très correct en tant que suite, au moins dans son fond dénonçant le racisme et appelant au rassemblement ouvrier contre les riches tyranniques et parasites.