Depuis l’annonce du projet, ce film avait de qui m’appâter et promettait de très belles choses. Il est assez incroyable qu’on ait eu plusieurs films sur l’espace et l’exploration spatiale elle-même (pour ne citer qu’Apollo 13), mais qu’aucun ne s’était encore abordé sur ce qui reste encore aujourd’hui le plus grand accomplissement de notre civilisation. Et Damien Chazelle réussit à proposer un film à la hauteur du sujet qu’il traite. J’ai beaucoup aimé qu’on suive le développement même du projet spatial du point de vue de Neil, nous faisant ainsi réaliser que chacun des astronautes y a pris part activement et cela depuis le tout début. Et là-dessus se calque l’évolution du personnage de Neil lui-même, où comment les différents drames qui se sont succédé l’ont forgé et conduit à être le premier être humain à poser un pied sur la Lune.
Le film en soit est très académique dans sa construction et son rythme, on a typiquement le biopic à Oscar. Cependant, le film réussit à nous happer dans son histoire, nous révélant les personnes derrière cette exploit incroyable, pas seulement leur nom ou leur visage, mais aussi qui elles sont, la réalité qu’elles représentent. On a un aperçu assez rare de la dynamique qui liait ces personnes, leur relations, leur défauts, et comment Neil évolue dans tout ça. On suit ainsi les différentes étapes du programme, chacune étant primordiale, mais on nous fait aussi prendre conscience des conséquences que cela peut avoir. Même lorsqu’on sait ce qui va arriver, même lorsqu’on connait déjà un peu l’histoire du programme spatial. Et pourtant, le film réussira son boulot de nous conduire à son final époustouflant et grandiose, tout en gardant une certaine sobriété et même, aussi étonnant que cela puisse paraître, minimisant au mieux le patriotisme américain. Le film est vraiment très bien construit de bout en bout, on ne s’ennuie pas et on se laisse émerveiller.
Le casting sera globalement bon, avec notamment Ryan Gosling qui nous sort une nouvelle prestation à récompense (pas sûr qu’il les obtienne cependant). Idem d’ailleurs avec Claire Foy, mais qui m’a paru beaucoup moins convaincante. Les rôles secondaires seront campés par plusieurs têtes connues, je pense notamment à Kyle Chandler, Corey Stoll, Ciarán Harris, Jason Clarke, ou encore Shea Whigham, et tous sont vraiment au poil. On notera d’ailleurs ici la peu représentation des rôles féminins, ce qui n’est pas anodin dans le sens où il n’y en a que deux. Peut-être le seul défaut, mais bon faut aussi prendre en considération que les rares femmes ayant participé au programme sont plus ou moins oubliées (et pour ne pas faire doublon avec Hidden Figures je suppose).
Techniquement, le film est une pure merveille. La musique très simple, se reposant sur un thème central avec plusieurs orchestrations, nous emmènera tantôt dans l’espace, tantôt dans les songes de Neil. L’utilisation du son d’ailleurs (et son absence dans certaines scènes) est également à souligner, un travail d’orfèvre. Les décors sont là aussi très bons, sans grande surprise. Les effets spéciaux sont pour le moins saisissants dans la reconstitution des scènes dans l’espace, ou encore les décollages des fusées. On soulignera aussi la mise en scène de Chazelle, une nouvelle fois millimétrée (parfois presque trop), sans réelle fausse note. Certes, il est un peu en-dessous lors des scènes plus introspectives et personnelles (et la steady cam est parfois trop employée), mais à côté on a un nombre de scènes tout simplement bluffante dans la majestuosité qu’elles illustrent : la scène d’intro, immersive à souhait, les différentes scènes dans l’espace, celles des tests, et puis même ce dernier plan… Bref, une nouvelle fois, Damien Chazelle nous offre un petit bijou à regarder, et je suis déçu de ne pas avoir pu en profiter en IMAX car ça vaut clairement le coup !
Donc oui, First Man est un biopic extrêmement classique et académique dans sa construction et sa réalisation, on pourrait presque cocher un bingo. Cependant, il ne se délite pas dans son sujet, et réussit à rester concentrer sur son histoire et à la transcender pour nous faire vivre une épopée extraordinaire mais avant tout humaine. À voir !