Gawin
5.4
Gawin

Film de Arnaud Sélignac (1991)

Avant de sombrer un peu dans l'anonymat de réalisateur de télévision , Arnaud Sélignac réalisera deux films pour le cinéma qui bien que partiellement ratés faisaient preuves d'une belle ambition afin de proposer des univers baignant dans le merveilleux, le fantastique et la science fiction. Sept ans après Nemo (Adaptation de la BD Little Nemo) le réalisateur proposait Gawin, un joli vrai faux film de science-fiction utilisant l'imaginaire comme moteur de guérison aux blessures du réel. Peu connu et passablement oublié Gawin reste un petit film bourré de maladresses mais pétri d'une jolie tendresse teinté d'une profonde mélancolie.


Gawin raconte l'histoire de Félix un gamin de six ans qui souffre d'une leucémie qui le condamne à plus ou moins longue échéance. Fan de science fiction Félix passe son temps la tête dans les étoiles au sens propre comme au figuré et rêve de rencontrer un extra terrestre comme dans les films et les histoires dont il abreuve son imaginaire. Son père décide alors de lui offrir ce dernier rêve en se déguisant en extra terrestre et en faisant atterrir une soucoupe volante de fête foraine dans le fond du jardin, poussant l'idée jusqu'au bout il embarquera même son fils pour un voyage dans l'espace.


Gawin est un film tout entier porté par cette idée du besoin de croire au merveilleux, au rêve et à l'impossible pour échapper au couperet du réel; un concept qui devra aussi s'appliquer au scénario du film qui ne supportera sans doute pas d'analyses trop cartésiennes et terre à terre. Le film écrit par Arnaud Sélignac et Alexandre Jardin ne fait pas toujours preuve d'une grande finesse notamment dans ses dialogues souvent trop explicatifs et toute la mise en place de l'intrigue s'avère quand même assez calamiteuse dans son écriture. Une fois les enjeux clairement posés le film trouve ensuite son petit rythme de croisière et surtout une forme d'adéquation et d'équilibre entre la naïveté du propos et celle de l'entreprise un peu folle de ce père de famille prêt à tout pour mettre des étoiles dans la tête de son fils. Gawin est un voyage initiatique comme une ultime tentative de thérapie par le merveilleux et cette ballade qui n'ira finalement pas plus loin que Chamonix et la mer de glace fera office d'odyssée intersidérale pour ce gamin rêveur et naïf . Gawin n'est donc à proprement parler un film de science fiction même si il adopte certains codes et images du genre pour faire entrer la fiction dans le réel.


Même si elle réserve de très jolis moments et des images fortes, la mise en scène de Arnaud Sélignac manque un peu de souffle épique et d'imaginaire pour totalement nous emporter vers le merveilleux suggéré par son récit et l'on se prend à rêver de ce que Michel Gondry ou Jean Pierre Jeunet auraient pu faire d'un tel concept. En revanche la très belle bande originale du film signée par Jerome Soligny épouse à merveille les différents univers du film en se faisant tour à tour angoissante, mélancolique, poétique, douce et même emphatique . Du côté du casting le jeune Bruno incarne Félix avec beaucoup de justesse, de naturel et de tendresse et l'on retrouve Jean Hugues Anglade dans le rôle de ce père un peu dépassé par les événements mais entièrement dévoué aux derniers rêves de son fils. Le comédien révélé par Patrice Chéreau et Jean Jacques Beineix parvient à être touchant y compris sous le masque en latex de l'extra terrestre Gawin qui ne laisse entrevoir que son regard toujours pétris de douceur et d'humanité. Un peu maladroit et emprunté dans sa folle entreprise de soustraire son fils à l'hôpital pour lui proposer la lune l'homme se retrouve contraint d'incarner un extra terrestre tout aussi gauche et hésitant que lui ce qui renforce assez magiquement toute la poésie de cette aventure. L'arrivée d'un vieil Hermite mi chaman, mi sorcier, mi guérisseur (oui je sais ça fait trois moitiés) semble alors conduire le film vers un improbable et dangereux happy end suggérant qu'on puisse guérir une leucémie avec un peu de rêve et l'apposition des mains. Mais la force de Gawin reste de proposer une fin finalement assez ouverte aux différentes interprétations dans laquelle certains verront un bon gros happy-end pas trop convaincant et d'autre comme moi une profonde mélancolie d'un retour à la réalité après une merveilleuse parenthèse enchantée. Félix est il véritablement soigné ou nous a t-on tout simplement donné toutes les raisons de croire à l'impossible comme Félix a cru en Gawin et sa soucoupe volante de bazar ??


Gawin reste un petit film attachant qui mérite vraiment le coup d'œil ; malgré ses nombreuses maladresses, son manque de souffle épique , ses dialogues pas toujours bien folichons il reste le pouvoir de l'imaginaire célébré ici avec beaucoup de candeur et de tendresse, suffisamment en tout cas pour faire de Gawin un joli petit film.

freddyK
6
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le 5 juil. 2021

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Freddy K

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