À contre-courant
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La vie est faite de choses simples, banales, rarement extraordinaires au sens de radicalement hors de l'ordinaire. Le monde est peuplé d'hommes et de femmes ordinaires, tantôt joyeux, tantôt tristes, parfois heureux, quelquefois malheureux. Ils rêvent ou désespèrent, ils aiment ou détestent, mais, où qu'ils vivent au monde, ils n'aiment ni la solitude, ni la contrainte.
C'est le propre de l'Homme et, dans la bande Gaza aux confins de nulle part, c'est encore plus vrai car tout est fait pour rappeler aux gazaouis qu'ils ne sont pas grand chose, à peine tolérés et invités à se contenter de peu, ce qui est déjà pas mal.
A soixante ans, Issa/Salim Daw envisage de se marier et sa préférence va à Siham/Hiam Abass. Issa est pêcheur en mer (dans la limite des cinq kilomètres d'eau côtière qu' Israël concède aux pêcheurs habitant le ghetto de Gaza) et Siham est couturière. Pour que « l'affaire se fasse », il faut que Issa fasse sa déclaration d'amour en l'assortissant de sa demande en mariage et mette fin ainsi à la noria de prétendantes que sa sœur organise.
Issa ne manque pas de charme, mais il n'est pas un tombeur de première et ses approches empreintes de timidité en deviennent très émouvantes. De tentative en tentative, le sourire de Siham se fait amusé et sa grande fille divorcée, qui vit avec elle, s'amuse délicatement du manège du soupirant de sa mère. Pour mettre fin à votre impatience, je peux d'ores et déjà vous le dire :
l 'affaire sera dans le sac et il y aura même un petit voyage de noce pendant lequel Israël se rappellera au bon souvenir des deux tourtereaux.
Pendant cette longue période de danse de séduction, la vie continue à Gaza. Quand Issa ne gazouille pas dans la boutique de sa dulcinée, il prend la mer, enfin le petit large concédé, et il pêche. Il va ainsi ramener dans ses filets une statue en bronze représentant le dieu Apollon, qui plus est, en pleine érection. Issa ramène sa pêche miraculeuse chez lui sans trop savoir qu'en faire. Il décide de la cacher dans une penderie, mais brise accidentellement le sexe dressé d'Apollon. Il lui servira de pièce détachée pour tenter de faire expertiser sa trouvaille.
Les autorités qui ont vent de l'affaire envoient la police perquisitionner. Ils réquisitionnent aussitôt l'objet d'art, non par souci de mettre à l'abri un patrimoine artistique local, mais parce que l'intérêt financier que peut représenter la statue sur le marché de l'art ne leur échappe pas. On peut être Hamas, on n'en a pas moins les pieds sur terre...
Les frères Nasser, réalisateurs du film, renvoient ainsi dos à dos Autorité Palestinienne, Hamas et Israéliens qui semblent s'être donné le mot pour compliquer la vie des habitants du lieu, en tout cas pour ne rien faire afin qu'elle soit plus facile. Quand la vie est ainsi contrainte, contrainte jusqu'à l'absurde, que reste-t-il si on n'envisage pas de fuir et de s'expatrier ? Il reste l'humour, mais même cela semble être contingenté comme l'électricité distribuée avec parcimonie et de manière aléatoire.
Créée
le 17 oct. 2021
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