I'm T.S... motherfuckin'-A. We handle shit. [...] Consider this situation... fuckin' handled.

Un thriller psychologique plutôt efficace. Au final, l’un de ses rares défauts, c’est que les pontes d’Universal ayant absolument le vendre comme un film d’horreur (ce qu’il n’est pas, même pas un film horrifique), on se retrouve du coup avec quelques scènes/plan jump scare complètement inutiles qui nous font même sortir de l’ambiance du film tellement c’est forcé. En mode « vous le voyez là mon jump scare ? c’est bien n jump scare hein ? vous avez vu le film d’horreur ? ». Et c’est non seulement dommage, mais aussi terriblement désolant. Parce que Get Out n’avait absolument pas besoin de ce genre d’artifice, fonctionnant très bien comme thriller psychologique à l’ambiance glauque. Sans en atteindre la quintessence, Funny Games est peut-être ce qui s’en rapproche le plus.

Même s’il y a une sorte de faux rythme qui s’installe dans le début, on rentre au final assez rapidement dans l’intrigue de Chris et de Rose. C’est un peu lancinant, notamment dans le prologue, puis on met assez vite le pied à l’étrier et l’intrigue entre enfin dans le cœur du sujet. Alors il est vrai que la question raciale est un point essentiel, puisqu’un des éléments de l’intrigue, et le film jouera notamment dessus par différentes manières. Je ne vais pas m’attarder sur la façon dont cette partie-là est traitée, mais je dois dire que je l’ai trouvée très convaincante et elle participe grandement à créer cette sensation de malaise, notamment dans le deuxième acte du film, où on est vraiment dans la peau de Chris.

L’atmosphère sera oppressante pendant une grande partie du film, et sans forcément jouer sur le gore ou la violence physique, mais bien sur le psychologique. On réalisera également tous les petits détails disséminés dans le premier acte qui prendront un tout autre sens dans la dernière partie du film. Tout cela combiné fait que Get Out est un thriller psychologique bien construit et surtout très bien rythmé. On brise un peu parfois la règle du huis-clos, mais en plus de permettre au spectateur de souffler un peu, ça participe quand même à renforcer le poids de cette ambiance, limite nauséabonde.

L’autre défaut du film, c’est qu’on grille très vite le « twist » final, qui sera sans doute la partie la moins bien négocié du final. D’une part parce qu’il n’y avait pas vraiment d’autres options compte tenu du contexte (ou alors on a à faire à l’un des personnages les plus stupides de l’histoire du genre), et aussi parce que le film essaye de le faire durer trop longtemps. On peut comprendre l’intérêt de garder cette révélation pour la fin, pour l’effet dramatique, mais une fois que Chris a compris la situation, il n’y a pas vraiment intérêt de poursuivre dans cette direction. Même si ce n’est que pour trois minutes. C’est dommage, car jusqu’à là, le film avait parfaitement fonctionné.

Concernant le casting, l’ensemble est plutôt bon. J’ai beaucoup apprécié Daniel Kaluuya et LilRel Howery, dont le duo à distance fonctionne vraiment très bien. Un peu moins fan de ce que propos Allison Williams, mais peut-être est-ce dû au personnage auquel je n’ai pas vraiment accroché. Idem pour Caleb Landry Jones d’ailleurs, presque trop facile dans sa prestation ; tandis que Catherine Keener et Bradley Whitford participent vraiment à créer cette ambiance anxiogène, tout comme Marcus Henderson et Betty Gabriel, qui nous déstabilisent à plusieurs reprises. Les autres rôles seront plus discrets mais tout aussi bons.

Techniquement, j’ai beaucoup apprécié le film. La musique se fera au final très discrète, et mise à part les 2-3 « accords à jump scare » complètement gratuit et inutile (quand je vous disais que c’était forcé), proposera quelque chose de très intéressant et participera à créer cette ambiance plutôt glauque. Les décors y participeront aussi, même si on reste dans un cadre plutôt classique dans le genre du huis-clos (et renforcera d’ailleurs le lien avec Funny Games). Quant à la mise en scène, je dois avouer que j’ai eu un coup de cœur.

Première réalisation de la part de Jordan Peele, et déjà on voit des idées très intéressantes. Le prologue par exemple, magistrale, mais je peux également citer cette scène d’hypnose (et la façon dont le subconscient de Chris est représenté à ce moment), la scène parallèle avec Chris et Rose d’un côté, puis sur le reste de la fête de l’autre, la scène où Chris sort fumer une cigarette (bien plus efficace que n’importe quel jump scare). Bref, une mise en scène très efficace et très bien exécutée, digne des plus grands films du genre.

Au final, Get Out est un bon thriller psychologique, efficace, angoissant et très intéressant de par son intrigue (qui soulève des questions importantes sur notre société et le racisme) et sa réalisation. Tout sauf un film d’horreur donc. Sans forcément être révolutionnaire, c’est sans doute un des meilleurs produits dans ce genre précis depuis plusieurs années. À voir !