Ghost in the Shell, énième tentative d'adaptation d'un manga par les américains... réussite ou (habituel) ratée ???


Dans un futur proche, le mouvement du transhumanisme est devenu majoritaire, plus des 75% de la population a des implants cybernétiques divers et variés. Parmi cette population figure le Major, être cybernétique d'une nouvelle génération, membre de la section 9, elle va devoir affronter un pirate qui s'attaque aux dirigeant de la société Hanka, leader dans son domaine, sous-traitant du gouvernement et... fabricant du corps du Major.


Commençons par le gros point fort du film : le visuel. Sanders nous livre ici une petite claque et c'est totalement dans l'esprit du manga originel. Ainsi dans la mégalopole asiatique cohabite les immenses buildings modernes à côté de bas fond plus traditionnel, le tout avec d'immenses panneaux publicitaires holographiques. Les implants "camouflés" (mains, connectiques...) sont très bien intégré lorsqu'ils se déploient. L'aspect mercantiles des implants est à peine évoqué, tout juste a-t-on le petit (et savoureux) échange entre Togusa et Ishikawa sur le nouveau foie de ce dernier. Le design des différents véhicules (voitures, avions, hélico...) reprends le style de l'anime, le spider tank a cependant dû se manger une enclume sur la tête car il s'avère aplati et plus large que l'original ce qui donne une sensation de plus fragile. L'ensemble dégage une sensation plus moderne que l'anime, en effet le côté futuriste se sent bien au-delà de l'informatique (on a un peu une sorte de Blade Runner mixé avec GitS) et des implants ce qui n'est pas forcément le cas de l'anime.
La mise en scène est également bien faite avec des chorégraphies pour les scènes d'action bien pensées... mais abusant "légèrement" de ralenti à la Matrix. Naturellement certaines des scènes les plus mémorables de l'anime ont été reprise : le saut du building pour l'ouverture, le combat dans le canal, la plongée dans la baie, le final contre le spider tank... Ces scènes ont subi des modifications plus ou moins importantes afin de s'adapter au scénario (le combat contre le tank a pas mal été modifié et déçoit par rapport à celui de l'anime).


Place au casting et là, c'est un peu moins fidèle à l'orignal... on aura d'ailleurs vu partout un gros bashing du film se résumant à white bashing, plus d'un résumant l'adaptation à ça et s'appuyant uniquement dessus pour descendre le film. Commençons donc par Scarlett qui incarne le Major. Tout d'abord soyons clair sur un point : dans le manga original de Masamune Shirow, il n'y a JAMAIS eu une quelconque indication comme quoi le corps et le nom (Motoko Kusanagi) du Major à l'état de cyborg étaient les mêmes que son nom et son corps d'avant. RIEN ne permet donc d'affirmer que le Major était une japonaise/asiatique avant d'être devenu une cyborg. Dans cette adaptation scénaristiquement c'est même une logique implacable qu'elle ne soit pas de type japonais. En effet, n'ayant pas de souvenir d'avant sa transformation, les seules informations dont le Major dispose sur son passé sont ce que Hanka a bien voulu lui dire à savoir qu'elle était une immigré (du nom de Mira Killian) qui a été victime d'un attentat. Il est donc on ne peut plus logique que le corps ne soit pas typé japonais. Pour ce qui est de la prestation de Scarlett en elle-même, ça reste correct sans être éblouissant. Les émotions et l'état psychologique ont du mal à passer quand à la coupe de cheveux cela ne rends pas. Pour le reste de la section 9... si Aramaki et Batou sont très légèrement survolé pour les autres ce sera le vide intersidéral : pas développés, transparents et inutiles. Takeshi Kitano nous sert un Aramaki différent, plus actifs toujours aussi qu'il ne faut pas sous-estimer : rusé et ne résumant pas à un simple chef bureaucrate de section, un vieux renard dans toute sa splendeur. Batou, incarné par Pilou Asbaek, perds lui cruellement en charisme s'avère moins armoire à glace, moins rustre, moins intimidant, moins "Terminator"... on se retrouve avec un personnage plus amicale. Au passage on aura ici une explication sur les yeux de Batou, un des rares moments qui mettra en avant son côté efficacité. Concernant Kuze, autant Michael Pitt s'en sort bien tant qu'on ne connait pas son personnage, autant après c'est la chute (et c'est ballot vu que c'est surtout après qu'on voit sa tête). Puis il y a les grosses têtes de Hanka Robotics où là curieusement les têtes européennes passent moins bien. Nous avons une grosse entreprise japonaise qui travaille en étroite collaboration avec le gouvernement japonais et pourtant son dirigeant (Cutter) et ses gros ingénieurs (comme la Dr Ouelet jouée par une Binoche pas trop en forme) sont du bon produit occidental et quand on connait la mentalité nippone, ça ne passe pas ce genre de chose.


Le scénario est un point plus ou moins faible du film, troquant le génie de l'anime de 1995 pour un classicisme manquant cruellement de saveur. Soyons clair : si vous vous attendez à un remake de l'anime de 1995 passez votre chemin, l'histoire n'a rien à voir. Ici nous avons donc un Kuze qui, mit à part ses excellentes capacités de piratage, n'a rien à voir avec un Puppetmaster. De même ses intentions se révèlent au final très basique, mais le gros reproche sur Kuze c'est qu'autant il s'avère bon quand il est mystérieux, autant il descend d'un sacré cran une fois qu'on connait sa véritable identité. L'intrigue s'avère facile à suivre malgré les quelques questionnements du Major et l'on avance droit tête baissée, les véritables méchants s'avèrent ceux auxquels on est habitué sans réelle surprise (trop aiguillé par les motivations de Kuze qui se résume malheureusement à une simple vengeance). Loin des intrigues et jeux politiques de l'anime (pas d'enjeux entre les différents services gouvernementaux, ni avec des gouvernements étrangers), si cette simplification rends le film plus accessible au grand public elle sacrifie une partie de la richesse de l'univers. Tout l'aspect dangerosité / conséquence du piratage des implants cybernétiques est aussi "survolée", on comprend certes, mais le film appuie nettement moins sur ces points que l'anime.
Les questionnements du Major, tout un sujet dans un anime où c'est une crise existence, s'avère aussi différents que classiques ici. En effet, point de crise existentielle philosophique, nous avons le droit à une bonne vieille crise identitaire. Elle ne s'interroge pas sur le fait qu'elle existe et qu'est-ce qui la définie, non, ici elle s'interroge sur sa place dans la société et son passé. Vu comme une humaine améliorée par ses coéquipiers, vu comme une simple machine (ou arme) par ses fabricants, vu comme le miracle d'une nouvelle espèce par sa conceptrice... Notre Major cherche un peu sa place dans cette société transhumaniste surtout que ses souvenirs ne remontent qu'à peine à un an. Une crise identitaire somme toute assez classique plus psychologique que philosophique.


Au final un bon film assez classique. Doté d'une esthétique réussi, il troque malheureusement le génie et la richesse de l'oeuvre original pour finir en produit bien plus accessible pour le grand public qui n'a pas forcément envie d'avoir toutes les réflexions existentielles du Major.

Spacewolf1
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Cinéma 2017

Créée

le 5 avr. 2017

Critique lue 410 fois

Spacewolf1

Écrit par

Critique lue 410 fois

D'autres avis sur Ghost in the Shell

Ghost in the Shell
T-rhymes
4

Il est où le Ghost ?

Ghost in The Shell.... Adaptation live des films d'animation Ghost in The Shell et Ghost in The Shell 2 Innocence, sortis respectivement en 1995 et 2004, . Eux même adaptés du manga culte de Masamune...

le 23 mars 2017

113 j'aime

26

Ghost in the Shell
Velvetman
6

Human being in The Shell

Le Ghost in The Shell de 1995 voyait le Major se poser une question : « Qu’est-ce que je suis ». La version hollywoodienne avec Scarlett Johansson en lead voit ce personnage mi humanoïde mi...

le 30 mars 2017

99 j'aime

4

Ghost in the Shell
Behind_the_Mask
7

Phantom Pain

Cher abonné, A travers ce modeste avis, j'aurais pu, après vous avoir dit que je m'étais rematé Ghost in the Shell, Innocence, Stand Alone Complex et Arise, me lancer dans un jeu des sept erreurs...

le 1 avr. 2017

91 j'aime

30

Du même critique

Initial D Battle Stage
Spacewolf1
9

Critique de Initial D Battle Stage par Spacewolf1

Anime orienté sur les courses de côte et le drift, Initial D a pas mal évolué sur l'aspect graphique. Si les "Stage" 1 (26 épisodes), 2 (13 épisodes) et 3 (film) accusent leur âge c'est...

le 24 avr. 2012

13 j'aime

Forza Motorsport 6
Spacewolf1
10

Le meilleur en 10 ans

MAJ 23/06/2016 : ajout des extensions Porsche / Nascar Après un cinquième opus épaulant le lancement de la Xbox One, Turn10 fête dignement les 10 ans de la série avec un sixième épisode...

le 28 sept. 2015

11 j'aime

1

Dynasty Warriors: Gundam 3
Spacewolf1
9

Le musou mature... avec une skin Gundam !!!

Et de 3 !!! Mais au lieu de juste rajouter quelques MS, Koei nous refond son jeu... pour notre plus grand bonheur. Histoire ??? DWG 3 propose une histoire exclusive, prétexte à la réunion de tout un...

le 9 mai 2012

7 j'aime