La fin de l'Empire commence ici.
L'Imperator César du moment sent qu'il va mourir, du coup il se dit je devrais me décider à adopter un cheum pour ma succession. Le truc c'est qu'il a un fils naturel, ce qui est quand même pratique, mais il n'est pas chaud parce que même si le rejeton est sensible et démonstratif dans l'expression de ses sentiments, 1. le petit Lucas-Aurèle Commode* a quand même une tête de chicano, du genre bien intégré quasiment Romain, ce qui fait franchement tâche avec le statut de César héritier de l'Empire, brun, 2. il ne bouffe jamais de barbaque, ça ne fait pas chef de guerre, 3. César a le scénario à dispo, 4. le petit reluque sa sœur bizarre. D'ailleurs celle-là tiens, ça ferait un putain de César, puis elle fait franchement plus Méditerranéenne de souche** sa fille, mais c'est une fille. Sage et modeste, oh là réfléchit-il paisiblement adonné au démembrement à vif d'un petit chrétien de six ans et demi, je peux pas changer les règles ni faire de coup d’État, ce qui a quand même de la gueule quand on est au pouvoir, abonde-t-il toujours dans sa tête en se référant au glorieux exemple de Louis-Napoléon Bonaparte.
Boulot-boulot, convocation de l'officier à la mode. Habile manager de ressources humaines, ce dernier, le gentil, sait préserver le lien de confiance avec ses subordonnés, ce qui laisse à penser que ça peut lui être utile pour la suite du film, mais non. C'est juste pour rallonger le film, cette histoire, Ridley, comme d'autres réals, fait ce qu'il peut pour étoffer un schéma gloire-chute-vengeance, bas-haut-bas, de sorte à ce que ça ressemble plus à un code Konami par exemple. De loin.
Voilà comment je fais des flash-forwards, juste un saut de paragraphe pour dire que le gentil avec sa team vient de tataner des barbares, ça dure une demi-heure ou deux, ce doit être important dans le scénario mais en fait c'est juste pour la beauté du geste, le jeu fera le reste. Or pourquoi lui, le César Imperator appelons-le Marco a lu le scénar déjà, mais ça tu le sais, puis il est confronté à un problème presque aussi sérieux que sa mort qui n'est plus très loin vois-tu la poindre à l'horizon non je ne vois que le ciel qui bleuoie et le soleil qui, le problème, le problème c'est le chômage technique qui menace le gentil parce qu'il n'y a plus de barbares à tataner (oui vraiment, la paix, d'un coup, que tout le monde ayant lu le scénario sait assurée pour un moment). Tant mieux d'ailleurs, parce qu'ils sont chiants. Or attention divergence d'intérêts, bam enjeu, le gentil s'en fout, il a cumulé les primes de risque sans jamais pouvoir poser de congé, il aimerait juste voir sa femme plus le résultat d'elle et lui, retrouver sa vaste piaule dans la campagne du Luberon qui a les avantages de 1. avoir des blés et des arbres, et de 2. ne pas avoir Didier Bourdon ni Marion Cotillard. Puis il est plutôt républicain (George Bush par exemple, il est derrière l'Alena, c'est pas rien). Mais il est disposé à faire un geste en échange de dédicaces de bouquins de Marco même si la moitié à été pompée à un chinetoque, Confucius.
Le petit Lucas-Aurèle, lui, est plutôt du genre progressiste, et a des idées de rénovation. La tradition d'adopter son successeur***, la tradition du Sénat, tout ça est dépassé, n'a plus de sens. Clarifions les rouages du pouvoir, permettons un exercice plus intelligible de la force publique face aux crises. Léser les enfants biologiques, combien de temps cela durera ? C'est une impasse. Et que vois-je, moi le moderne ? Débarquer ce type dirigeant d'armée, assez politicard pour se faire apprécier on ne sait trop comment par les bidasses, dans la position de frère. Ce qui fait que ma sœur devient la sienne aussi, pourtant il y a quelques années... Tout à mon dégoût, mais tout à mes émotions de fils aimant, j'ai la bonne idée d'abréger la douloureuse fin de vie de papa par un câlin. Ne suis-je pas d'une grande prévenance ? Pas de bol, je crois que ma merveilleuse sœur a lu le scénario, puisqu'elle me colle un aller-retour. Ça fait mal. Je suis paré pour devenir le méchant, hélas. Cela me garantit des troupes à volonté et à fidélité illimitée, jusqu'à ce que mon dévoué second me trahisse, c'est la règle. Il y a de quoi devenir fou, mais le compte à rebours est lancé, il ne faut pas tergiverser. Je suis le chat et je dois poursuivre la souris. Hors d’œuvre : embuscade en forêt et localisation Pages blanches / Google Maps de la masure pour une petite Carthaginoise avec supplément viols à répétition, à moins que Lucas le Commodore m'aurait menti cela dit, dans tous les cas ça fait vraiment le méchant qui s'applique pour tenir son cahier des charges avec zèle, et ça force le respect.
Après le méchant rentre à Rome Empereur, et ça a vachement de la gueule. Leni Riefenstahl, une réalisatrice comme il y en a hélas trop peu, immortalise tout ça. Puis le Commodore va montrer toujours plus son désir de faire des Adèle-Muguette avec sa sœur et va draguer son neveu Lucas Jr aussi. Il est vrai, ce dernier est très mignon.
Quant au gentil, tout juste bon à piquer lorsqu'il est ramassé à la cuiller, se voit offrir une seconde chance grâce à son tatouage et à ses muscles. Il devient pote avec un sidekick, Djimon, qui ne servira pas à grand chose mais qui sera épargné, alors qu'il aurait dû crever, par la mort de l'acteur de Proximo (leur maquereau). Il se bat, il tue tout le monde, il apprend à faire le show grâce aux cours de Ryback et de John Cena, il gravit les échelons, et partout le public le kiffe, et il a un surnom débile scandé à chaque fois, le Luberonnais, comme si c'était le seul gladiateur à venir du Luberon, non mais franchement.
Après il y a une tentative de rébellion avec les potes gladiateurs et des potes d'armée, je n'ai pas compris à quoi ça devait mener mais tout de façon c'est mort, je crois que c'est à cause de Lucas Jr., et puis le Commodore saute les plombs et tout le peuple le lâche en même temps dans une invraisemblable ingratitude. Il est vrai que l'Imperator qui descend dans l'arène, c'est déconcertant. Le public lèche, lâche et lynche. Le gentil va aussi être infidèle à sa femme qui l'attend au paradis des mains dans les blés. Le boss final c'est le Commodore, ce qui est fortement paradoxal vu que ce n'est pas un pro, il va se faire écraser. On pense bien à un petit handicap (un coup de couteau bien placé avant de commencer), mais ça ne suffira pas à empêcher la mort du méchant qui se fait trahir au meilleur moment et qui n'a pas d'honneurs contrairement au Luberonnais. Voilà voilà.
*Lucius Aurelius Commodus, à ne pas confondre avec l'autre Lucas, Lucas Jr., le petit de la sœur.
**C'est peut-être tout l'inverse, mais si tu remarques ça tu seras gentil de remarquer que dans le film tous les Romains parlent anglais, ce que tu trouveras louche, donc laisse-moi mes translations.
***Chaque Empereur romain jusqu'à Marc-Aurèle a vu son fils... adoptif lui succéder. Or Commode est un fils biologique, et Maximus adoubé comme un fils adoptif. Pourquoi Commode est-il ainsi écarté du pouvoir par son père ? Pour perpétuer la tradition ?