Par OhCaptainMyCaptain
Godzilla made in 2014. Pour tout dire je suis l'évolution du projet depuis le début, alors qu'il était monté pour se débarrasser de l'immonde bouse d'Emmerich dans les années 90, avec le Godzilla méchant méchant et aussi agile qu'un vélociraptor. L'idée d'un réalisateur inconnu, Gareth Edwards et du respect total de l’œuvre original m'a plu, j'ai cependant eu peur que la sortie de Pacific Rim l'année dernière ne fasse de l'ombre. Qu'en est-il ?
Sortie du cinéma : cette étrange impression d'avoir pris une claque totale tout en ayant un goût amer dans la bouche.
Alors soyons claire tout de suite : nous avons en face de nous le vrai Godzilla, tant visuellement que dans son caractère. Et...il est tout simplement magnifique, respectueux mais modernisé. Et ce cri...J'en ai encore des frissons partout. Et c'est vraiment lui, et non un vulgaire méchant de destruction massive. Alors oui, il détruit tout sur son passage, mais... imaginez seulement un ours attaquant sa proie. Va-t-il prendre le temps de raser toute la forêt et écraser toutes les petites fourmis jusqu'à la dernière ? Non bien entendu, et c'est comme ça qu'a été pensé le « mâle alpha », la « bête des temps anciens » en question. Et tout, en pesant ces mots, est expliqué scientifiquement et paraît « logique ». Godzilla est neutre, il vit sa vie et joue son rôle dans la chaîne alimentaire. Comme toutes les espèces vivantes sur cette terre. Et les hommes le respectent en tant que tel, et vice versa, jusqu'à.... De ce point de vue, le film se rapproche plus du dessin animé qu'on regardait tous enfant. Concernant le film en lui même, l'impression de Pacific Rim est tout de même éloigné et le dépasse dans tous les domaines. Alien Vs Predator ? Les trailers ne le tease même pas, donc le silence est de mesure.
Dès le générique, le réalisateur donne le ton, il fait dans le réaliste, les images d'archives, les renseignements classés X, la justification des essais atomiques de M.Chirac dans le Pacifique... S'en suit d'autres très bonnes idées de réalisation, dont des petites trouvailles, comme avec une simple bouilloire (colère et tension qui montent), des oiseaux, le fait de voir les combats du géant des yeux d'un homme (symboliser notre impuissance) ou un magnifique parallélisme héros/Godzilla. Il y a d'ailleurs une influence -hommage certaine de Jurrassic Park dans certaines scènes, sans être lourd, qui sauront vous ravir.
Niveau technique visuel, outre le cas Godzilla déjà évoqué, tout est minutieusement travaillé et vous prendrez une claque visuel. La scène finale de combat vous en fera jouir avec beaucoup de petites techniques efficaces. Mention spéciale à une scène de parachutes au dessus d'un San Francisco à feu et à sang (très réaliste et superbe, tant dans le choix/dégradés de couleurs, à en donner froid dans le dos et transmet parfaitement l'atmosphère irrespirable), magnifiquement réalisé, à vous faire croire être avec eux à sauter. Une de mes plus belles expériences de spectateur. Niveau 3D, elle est plutôt efficace, même hors combat, où elle est utile et avec un bel effet de profondeur. C'est à noter, n'étant pas un grand fan de cette technique.
Niveau performance sonore, l'équipe du film frôle le génie, avec une musique très bonne avec des influences occidentales, japonaises et océanienne. Il faut d'ailleurs en profiter pour dire à quel point le film est respectueux de ses différents pays, sans jamais tomber dans les bon vieux stéréotypes trouvés dans tous les films hollywoodiens. Elle colle toujours à l'ambiance, et sert les astuces de mise en scène. L'idée des scies frottés de Zimmer dans The Dark Knight est reprise, adapté à la scène, à donner un sentiment de mal à l'aise orgasmique à l'oreille.
Oui, cela paraît très (trop) positif mais... Malheureusement le film a beaucoup, beaucoup trop de défauts à coté. Alors, oui, certains sont inhérents au genre de « catastrophe », mais il avait réussi à s'en défaire avec ses belles qualités, sans réussite au final. Le scénario est parfois, voire toujours si on en écarte les trouvailles de mise en scène et le background travaillé, stéréotypé au possible. Le héros est un soldat musculeux, sa femme est une jolie infirmière sans défense, ils ont un enfant tous les deux... Le spectateur aura peu d'empathie pour eux de ce fait et ne s'inquiètera que peu de leur sort, surtout du fait que le film est de genre, puisqu'il devinera aisément leur fin. Le héros peut survivre à une chute de 100 mètres dans l'eau (alors que dès 10 mètres un saut de ce genre est dangereux, la surface de l'eau devenant comme du béton) sans aucune égratignure. La « menace » se nourrit de radiation ? Tiens si on lui faisait péter une bombe H à la gueule pour l’arrêter, qui plus est en plein San Francisco si possible ! Et puis bien que sa peau est une cuirasse infranchissable et ça fait 50ans qu'on le sait, ben on va quand même continuer à tirer dessus au fusil d'assaut ! Et puis ben tiens, on va envoyer des avions de chasse alors que la menace a des pouvoirs électromagnétiques ! Et puis s'il vous plaît, le service de traduction pour les sous-titres...: Oui c'est une très bonne idée de justifier les noms japonais par des acronymes, mais...Quelle armée au monde mettrait "ultime" dans ces dénominations? Ca sent la série-B à plein nez! Petit défaut visuel mais mineur à souligner également, le comportement pas toujours très réaliste des croiseurs sur l'eau lors des tsunamis. Le numérique n'est pas forcément à banir, mais ici l'utilisation de maquettes aurait sûrement plus convenue niveau crédibilité à la situation. Le scénario ne sert pas qu'à justifier un combat avec Godzilla, comme un vulgaire film de catastrophe l'aurait fait (prends ça Emmerich) puisque contient des surprises inattendues mais on n'en est pas bien loin parfois. Et faute de casting énorme de l'Amiral chef des armées. Une grenouille asthmatique !
Concernant casting donc. Le héros Ford est joué par Aaron Taylor Johnson (Kick Ass, QuickSilver dans Avengers 2). Alors ce n'est pas le rôle le plus compliqué de sa vie, il a appris à mieux jouer depuis Kick Ass, mais... il fait le job, sans plus quoi. Sa femme Ellie est joué par la sœur cadette des jumelles insupportables, Élisabeth Olsen, qu'il retrouvera d'ailleurs dans Avengers 2. Elle est plutôt convaincante en amante/mère quotidienne, tient plus que la route quand le film part dans son virage dramatique mais...beaucoup moins dès lors qu'elle se retrouve face au danger...Dommage !
Bryan Cranston joue le papounet de Ford : toujours aussi jouissif en maniaco-dépressif. Ken Watanabe (Inception) est plutôt pragmatique dans son rôle de scientifique, pas trop lourd dans son humanisme et est donc plutôt convaincant.
Le film est donc très bien travaillé en amont, bien réalisé sur le coup, est une claque visuelle et auditive mais les ficelles dramatiques sont aussi visibles que les cordes du Golden Gate. Elles nous font parfois sortir du film, mais on y rerentre vite grâce au réalisateur et dès que Godzilla réapparaît. Il devient directement une référence du genre, mais en contient donc les limites. C'est tout de même la renaissance de Godzilla au cinéma!