J'ai l'impression que lorsque des cinéastes japonais s'emparent d'un genre très américanisant ici le film de complot, ça donne souvent des œuvres ambivalentes qui n'empruntent jamais un chemin typique, le cheminement est très bancal et pourtant j'en ressors comme si je venais de visionner un film plutôt unique en son genre où les défauts sont facilement gommables tant les cinéastes sont à fond dans leur projet et ont ce désire de déployer une nouvelle variation autour de thèmes maintes fois traités.
Je ne généralise pas mais je me suis fais cette remarque des quelques films avec un sujet ultra populaire que j'ai visionnés comme un complot fomenter par des membres du gouvernements, le voyage dans le temps ou encore la mort qui donne la possibilité au protagoniste de revenir sur ses choix passés.
Premièrement celui-ci se distingue par l'incertitude de cette machination et de placer un quidam comme victime de celle-ci. Tu ne peux pas faire plus tendu puisque le gars est aux prises d'évènements qui le dépassent, une forme de déterminisme de ses actions passées et en plus de ça le pauvre gars n'a pas d'autres moyens que de courir, c'est tout, courir pour sa survie pendant 45 minutes, bordel c'est l'antithèse d'un traitement spectaculaire sous forme de vendetta à la Europacorp.
Cette grande métropole de Sendai est le lieu idéale pour la course folle du personnage et surtout le cinéaste sait comment mettre en scène ses grands méchants : en plus d'avoir des gueules peu recommandables (je veux dire Teruyuki Kagawa de base a un faciès monstrueux, il ne lui en faut pas beaucoup pour être menaçant) et par certaines habitudes qui les définissent au premier coup d'oeil comme le casque anti-bruit du sous fifre, sa façon de se déplacer ou de sourire, son professionnalisme sadique (il pourrait sortir tout droit d'un manga, franchement il est flippant je trouve), le type a compris comment introduire et iconiser ses méchants comme a pu le faire les deux Coen avec Chigurh par exemple; la séquence dans la voiture en pleine nuit et très réussie elle aussi.
Et secondo après 45 minutes sous tension c'est comme si Yoshihiro Nakamura avait joué toutes ces cartes et qu'il ne lui restait plus que déployer le reste de son intrigue à travers ses personnages secondaires.
Je l'ai trouvé très belle cette seconde partie mais en même temps il faut réussir à laisser son incrédulité de côté parce que sinon les plus pragmatiques vont se tirer les cheveux et finir chauve à la fin du film.
C'est comme si le réalisateur avait privilégié le fond au détriment de la forme (quand je dis forme je veux parler des actions concrètes, de la considération du temps et de l'espace etc...) et préfère célébrer la confiance dont témoigne chacun des personnages au protagoniste : une ode à l'amitié et une façon peu commune pour un héro de se sortir de cette spirale en comptant uniquement sur les autres.
Comment croire à cette intrigue avec la batterie de voiture? Une femme qui sait changer une batterie sérieusement ? Comment croire que les deux temporalités finissent par ce rejoindre en ce lieu précis, à ce moment précis ? Comment croire à cette mère de famille capable de prendre des risques avec sa fille pour une autre personne ?
Quid de ce tueur en série qui se révèle être un gars tout à fait recommandable ? etc...
L'ensemble est aussi imprévisible qu'improbable mais le déterminisme de cette première partie se transforme en une détermination exacerbée franche et très touchante (le père à la TV sans déconner c'est surréaliste un discours pareil mais en même temps c'est vachement beau...).
C'est blindé de défauts surtout scénaristiques (que l'homme au pompe finisse comme c'est pas possible...) mais Golden Slumber c'est un grand mélange d'éléments disparates et qui fonctionne malgré tout parce que tout cette seconde partie est d'une sincérité désarmante mais vraiment...
La scène entre le Aoyagi et la pop star est trop cool!