La route vers le bonheur
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le 27 févr. 2019
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C'est devant ce film dont personne ne parle et qui est diffusé dans mon cinéma Arts & Essais que je vais tenter au mieux de m'ouvrir à mes lecteurs.
Malgré une animation qui me laissait perplexe au début, je me suis retrouvé dans Happiness Road sur plusieurs points et surtout en son héroïne, Tchi, moi-même ayant grandi dans un cocon familial particulier bien que celui de Tchi ne l'est pas dans sa culture. La réalisatrice Hsin Yin Sung a créé un film semi-autobiographique sur la recherche d'identité, mais pas que. La détermination de soi, la voie que nous traçons, celles de nos prédécesseurs ou la notre. Différents points de vue de notre vie sont racontés à travers des regrets, des sentiments. Les engueulades, la peine, le deuil, les regrets, avancer tout en reculant, savoir ce que nous voulons.
Je partage plusieurs points communs avec Tchi. Comme elle, j'ai eu le soutien d'une grand-mère différente, que beaucoup peuvent considérer comme une "indigène". Un soutien auquel j'aurai toujours du mal à m'accrocher, mais dont Tchi pourra toujours fantasmer comme étant son point de chute, sa vitamine qui lui permet de rester sur Terre entre deux visions de sa grand-mère disparue. Sa grand-mère descendue du ciel ou simple interprétation de son esprit (aucun doute sur la deuxième hypothèse) ne se manifeste que sur les doigts d'une main mais chaque apparition est une étape franchie pour Tchi, mais quel est l'aboutissement ?
Comme Tchi je m'en pose encore la question. Me remémorant comme elle mon enfance bruyante et carburant aux rêves. Ne voyant la vie qu'à travers le prisme de l'esprit un monde à la fois joyeux et correspondant à nos envies, et effrayants mais plus rassurant qu'une réalité morne. Elle n'aura de cesse de se demander quelles auront étés ses rêves. Sont-ce ceux de ses parents qui veulent la voir en docteur ? Est-ce un rêve de vouloir le bonheur de son enfant en espérant qu'elle nous aide financièrement ?
La question que se posera Tchi en découvrant la vie déplorable dans laquelle ses parents se sont enfoncés en son absence se dira que couper les ponts avec eux pour vivre sa vie comme elle l'a toujours rêvé était égoïste. Mais se rappellera durant son départ et son long retour à Happiness Road que son bonheur suffit, qu'ils ne sont ni les gardiens d'une vérité ou d'un bonheur préconçu mais des guides qui, comme tout êtres humains sont capables de commettre des erreurs même en étant passé par notre chemin. J'aurai voulu moi-même m'en rendre compte plus tôt, je cache une certaine peur de découvrir ça trop tard comme Tchi, moi qui approche de son âge au moment où le film commence. Ayant grandi dans un cercle familial vaste où je peine à me faire entendre et où les différents membres que j'aime malgré tout m'ont fait penser que mes passions et mes envies ne devraient êtres que des options à ranger à côté d'une vie stable. Comme Tchi, je les aime mais il m'arrive d'avoir envers eux un certains mépris pour différentes raisons. Comme Tchi j'ai envie de me détacher d'eux. Comme elle, je ressentirai probablement de la honte le moment venu.
Tchi se dira qu'elle n'aurait jamais dû quitter sa famille, qu'elle n'aura ramené à Happiness Road que des regrets en partant vivre le rêve Américain qu'elle fantasmait toute ces années pour revenir à la case départ avec un enfant qu'elle n'est pas sûre de désirer. Mais ses retrouvailles lui font travailler sur elle pour mieux se comprendre. Le rêve que l'on se fait, personnifié par une figure blonde aux yeux bleus dans le film se révélera n'être qu'illusoire, ni rêver ses rêves ni les ranger, il faut peut-être les vivre soi-même quitte à ce que cela nous mène à des regrets. Mais cela est peut-être le véritable chemin vers le bonheur, car Tchi n'aura certes rien accompli en dépit de tous les malheurs qu'elle a traversé avant, pendant et après son retour, mais elle aura atteint un idéal qu'elle ne soupçonnait pas. L'accomplissement des rêves n'est peut-être pas la fin, ils ne sont peut-être qu'un but pour nous permettre de mieux découvrir qui nous sommes. Comme Tchi tiraillée entre fantasme et constance d'une vie ou entre être Américaine et Taïwanaise. A l'instar de Rayane, jeune homme triste et perdu entre sa morne vie réelle et son alter-ego Housecoat tout puissant et plaisantin. Jeune homme vivant comme Tchi, dans la crainte de voir la déception dans les yeux de sa famille.
Si Housecoat n'est qu'une carapace, Tchi verra la sienne brisée quand elle assiste au poids de ses décisions à travers ses parents et ses amis. Son ancien camarade, disparu en trouvant un idéal souhaité; son cousin Wen, ayant perdu une vision parfaite pour avoir embrassé des idées contraire à la masse pour finalement vivre une relation houleuse avec une fille perdue entre deux cultures pour être parti vivre le rêve Américain. Mais Betty son amie de longue date, elle aussi rêveuse, envisageant un temps la solution fatale devant l'effondrement successif de ses fantasmes avant de trouver une nouvelle raison d'avancer; ainsi que ses parents qui plaçaient beaucoup d'espoirs en elle pour la voir revenir au même point mais heureux de la retrouver lui permettent d'apprendre à elle et au spectateur que je suis que la fatalité n'existe pas, il y aura toujours un soutien inattendu devant l'échec. Revenir au point de départ, mais continuer à avancer. Tchi n'est plus la même du début à la fin, elle atteint une forme de complétude et d'acceptation de soi comme du passé pour avancer et se créer un futur, pas un futur sensationnel ou un rêve, mais un futur confortable et chaleureux dans lequel elle pourra enfin dormir en paix, où les fantasmes seront des rêves sans regret.
Rayane doute fortement qu'il puisse accomplir ses rêves un jour. Je ne passerai certainement pas par le même chemin que Tchi et je suis préparé à l'idée que si je réussissais à faire le premier pas vers mon rêve même si il devait s'arrêter-là, au moins j'aurais essayé et le chemin ne s'arrêtera pas et j'espère pouvoir compter sur ma famille le moment venu comme j'ai honte aujourd'hui de compter sur eux maintenant. Moi qui aurait voulu me lancer dans le cinéma, je me rends compte de tout le temps que j'ai perdu à me questionner, à ne pas me rendre compte que mon amour du cinéma et de l'imaginaire pouvait être une force plutôt qu'une faiblesse. Je vivrai toujours avec ce regret de ne pas avoir accepté les outils comme l'apprentissage du dessin pour me permettre d'exulter ce qui passe par mon esprit inadapté à la société moderne. J'espère un jour pouvoir être en paix avec ce regret. Et j'espère un jour avoir le courage d'affronter ceci tout en espérant qu'il ne soit pas trop tard du haut de mes 22 ans et sans diplôme, j'espère surtout avoir le courage de me lever de mon fauteuil un jour, j'ignore si je l'ai, peut-être que parler aujourd'hui est un signe vers une voie, peu importe laquelle étant donné ma situation statique.
Il m'est plus facile de vous parler à vous mes lecteurs de Senscritique car je sais que vous ne me jugerez pas en fonction de ce que je souhaite en ignorant notamment les détails de ma vie. Car je sais que ma famille ne me lit pas et que je doute qu'ils puissent me comprendre un jour. Je ne leur parle pas de ma passion. Ils sont plus ou moins tacites avec ça, ils doivent penser que ça n'est pas sérieux, que ça n'est qu'un hobby.
Même si Happiness Road ne parle pas de hobby ou de passion déviante mais de rêves et de regrets, même si je doute qu'il me fera changer, Hsin Yin Sung est la première personne avec qui j'ai discuté de ça de façon sincère pour la première fois à travers mon visionnage de son film d'animation. Merci.
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le 2 août 2018
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