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Attention, cette critique regorge de spoilers. A lire en connaissance de cause.
Alexandre Aja est pour moi synonyme de mon adolescence. Il est un des premiers réalisateurs d’horreur que j’ai su identifier, sans doute du fait qu’il soit l’un des pionniers de la nouvelle vague du cinéma d’horreur français (auprès de Gans et Laugier) et qu’il était donc de facto singulier. Autant dire que Haute Tension m’avait fait forte impression, ne lésinant pas sur les effets cradingues (de belle facture) et sur une horreur impressionnante pour mon jeune âge. Mais au vu de son twist, il ne m'était jamais venu à l’idée de le revoir, jusqu’à aujourd’hui.
Force est de constater que même en connaissant le dénouement final, le film n’usurpe pas son titre. Marie (Cécile de France) se pose comme une héroïne de survival aux réactions émotionnelles crédibles face à la menace de ce tueur rougeaud, lubrique et beauf. Elle est accompagnée par une caméra anxiogène, dont les mouvements fluides viennent amplifier l’urgence de ses réactions. Dans ce lieu non défini, qui pourrait tout aussi bien être la France rurale que le midwest américain (des flingues partout, le muscle car…), ou la Roumanie où le tournage a eu lieu, tout est créé pour que le spectateur n’ait comme repère que les personnages.
Bien évidemment, impossible d’aborder le film sans parler de la révélation de la fin (dernier avertissement pour les spoilers). Car tout au long du métrage, de nombreux indices sont laissés quant au dédoublement de personnalité de Marie, et rendent un nouveau visionnage ludique. Le plus important est la constante présence des deux personnages en simultané dans le récit. Si l’un est absent à l’image, alors il sera présent dans l’habillage sonore. Haute Tension est mutique, ce qui permet aux effets audio de faire apparaître ce qui n’est pas à l’écran, par le crissement du cuir des chaussures du tueur et son souffle asthmatique. Marie et son poursuivant sont indissociables. La caractérisation du mâle prédateur est renvoyé à la jeune femme, jusque dans une poursuite finale où toutes les vannes sont ouvertes dans un accès de démence cartoonesque. La femme est un homme pour la femme, si l’on souhaite pervertir Hobbes.
Ces louanges s’accompagnent tout de même d’un bémol. Lorsque l’on connaît le pot aux roses, la seconde moitié du film traîne en longueur tant elle joue sur son ressort scénaristique. Haute Tension n’en reste pas moins un survival efficace, plutôt malin, qui supporte plutôt bien la relecture. Un bon tour de force tant il est courant que les films reposant sur un twist ne dépassent jamais le simple constat de la surprise.