Heat
7.8
Heat

Film de Michael Mann (1995)

Image bleue, décor bétonné, petit matin, réglages minutieux, musique synthétique, sifflement de balle, froissage de taule, jusqu'au bout, Heat est un film froid. Une froideur qui m'a tiédi au premier abord et même si j'en apprécie la plus grande partie, je garde toujours quelques réserves en stock.
Sans dire qu'il est bancal, je trouve que ce film penche. Bien sûr, je ne remets pas en cause la mise en scène, l'esthétique, les acteurs, la musique, le découpage ou ce à quoi vous pensez et que moi j'oublie. Non, non, non, ma critique se tourne vers des choix imposés par le seul fait que la fin semble écrite avant le début. Implicitement, une fois la discussion entre les deux personnages principaux terminée, ils rentrent chacun dans un registre programmé leur retirant tout libre arbitre, toute vie.


Si ça penche d'un coté, c'est bien celui de Vincent Hanna, seul personnage haut en couleur, super flic de la criminelle qui enverra, à lui seul, toute l’équipe de truand en enfer. Il est tellement fort comme flic qu'il ne s'intéresse pas aux braqueurs. Ce qui laisse le champs libre depuis des années à McCauley, voleur minutieux et solitaire pour dérober un pognon de dingue à de riches profiteurs de la misère humaine. Jusqu'ici, chacun évolue dans sa sphère jusqu' à l'apparition de Waingro, peintre en bâtiment qui badigeonnera en rouge un joli braquage artistiquement calculé dans une tonalité plus pastelle.


C'est ainsi que la tragédie va irrémédiablement se former. Tragédie car L.A., aussi grande soit elle, n'est qu'une énorme prison dont aucun protagoniste ne peut sortir, les murs étant constitués par une chorale de destins interférant les uns contre les autres. Hanna, en investiguant d'une manière survitaminée (snif) va pousser l'équipe de McCauley dans ses derniers retranchements, soit l'attaque audacieuse d'une banque en plein jour qui finira par une fusillade mémorable.


Jusqu'ici, je ne peux nier, le plaisir est complet. Pourtant une chose me titille. Malgré le fait que les deux personnages évoluent dans la même dimension, qu'il n'y ait pas de voyage en hyperespace à chaque bout de l'univers, je ne peux m'empêcher de déceler des distorsions dans la flèche du temps. Des contractions en faveur du policier et des dilatations à l'encontre du voleur. Quel que soit le coup initié par De Niro, du mieux préparé au plus spontané, Pacino garde sans cesse un coup d'avance. Une injustice développant une compassion, pour la victime, obligatoirement frustrée par un final encore distendu partialement.


Heat, c'est le drame d'un criminel au sang froid, éteint, alors qu'une flamme prenait vie en lui, par un policier au sang chaud, lui même refroidi, tant par ses déboires conjugaux que par la perte de son alter égo. Personne n'est gagnant, pas même le gentil. Je peux vous dire que j'en sais quelque chose. Le mec qui se barre de chez sa femme en embarquant juste une télé, ça me rappelle mon père, aujourd'hui, une espèce de Scrooge qui rêve de pouvoir apprécier la saveur d'une pomme.


PS: Maintenant, fermons les yeux et imaginons Bob faire le flic et Alfredo le truand, ça aurait donné.

Toshiba
7
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le 14 déc. 2018

Critique lue 438 fois

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Toshiba

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