Fond noir, animation en collages photographiques type début 20ème (technique appelée "cut-out"), bande sonore constituée de bruitages intriguants, on embarque dès les premières secondes, avec cette petite perle de Surréalisme, dans un voyage en Abstraction proche de ce que je qualifierais d'une "neuro-écriture automatique". Reprenant tous les codes du surréalisme visuel, nous accédons à une succession de symboliques à la narration en roue libre, par des petites scènes remplies de détails et d'objets divers en mouvements saccadés, hors de la logique et en cadavres exquis, parfois entrecoupés, en guise d'entractes mobiles, de rouages mécaniques.
Des sarcophages qui se dandinent, un chien et un chat qui volent, une pastèque qui se balade de tableau en mécaniques d'usine, une danse macabre avec des parapluies, des mannequins de Mode sortis de tuyaux obscurs, l'enchaînement des scènes, sans queue ni tête mais néanmoins liées ensemble dans une succession logique des formes et des mouvements, nous emmène dans un état second introspectif et contemplatif.
Enfin, personnellement, j'ai l'impression d'être un légume surréaliste ravi.
Attention, il s'agit ici plutôt d'un moyen-métrage artistique expérimental plutôt que d'un film à proprement parler, le réalisateur étant avant tout un artiste peintre américain de la vague avant-garde surréaliste.
Cet honorable monsieur, nommé Harry Evereth Smith, a travaillé dans ses œuvres cinématographiques, picturales et sonores sous diverses influences telles que l'ésotérisme, la cosmologie (il finira d'ailleurs Shaman) et est étroitement lié à plusieurs vagues artistiques américaines de type Beat Generation et psychédélisme.
On retrouve dans cette œuvre l'essence en melting-pot de toutes ces choses en experience synesthétique et pour qui aime un peu ces univers, je pense que ce film frôle la perfection.
Pour comparer à ce qui vient de chez nous, son travail n'est pas sans me rappeler ce qu'a pu donner la coopération des univers de René Laloux et Roland Topor que j'affectionne particulièrement. (Ex : la Planète Sauvage).
Si vous voulez tenter cette aventure mindfuck, rendez-vous :
Par ici avec la bande son originale
https://m.youtube.com/watch?v=zbjSSyAo9WA
Et par là avec une bande son plus moderne tirée d'une projection du festival international des films de San Francisco (qui rend vraiment bien aussi) :
https://vimeo.com/77367952/description