Body Double

Hit Man, c'est l'histoire d'un prof de philo à l'université participant parfois à des missions d'infiltration consistant à piéger des gens ayant des envies de tuer en engageant un tueur à gage. À cause de la folie du personnage de Jasper, le faux tueur à gage, c'est Gary Johnson, notre prof de philo, qui va devoir le remplacer et, donc, se faire passer pour ce faux tueur à gage. 

Le film s'ouvre sur un cours sur Nietzsche où il est question de sortir de sa zone de confort, de vivre dangereusement, de prendre des risques. Et il y a d'autres séquences de cours dans le film qui sont assez drôles, car on voit le personnage de Gary appliquer les idées qu'il énonce, qu'il enseigne à ses élèves.

Il y a aussi l'idée qu'on change continuellement, même l'adulte qui est amené dans le film de façon peut-être un peu abrupte, mais qui va bien à la manière dont fonctionne le film. 

Ces idées étant posées, le film enchaine les rendez-vous où Gary Johnson va jouer son rôle avec joie, passant de rôles en rôles, adoptant différentes personnalités en étant toujours très convaincant. J'avais d'ailleurs peur que le film en fasse trop avec ces différentes personnalités, mais absolument pas, c'est plutôt bien dosé et on comprend très bien l'idée. Ce qui m'oblige à dire que Glen Powell est vraiment génial dans son rôle. Ce n'est pas forcément un acteur qui m'intéressait plus que ça, mais maintenant, j'ai vraiment envie de voir ce qu'il nous proposera dans le futur. 

Le film pose la question morale de ces différents rendez-vous et, même si elle est logiquement justifiée dans une séquence de tribunal, il y a quand même quelque chose qui va coincer lorsque notre personnage va se retrouver face à une femme qui a peut-être de bonnes raisons de vouloir tuer son mari. 

Et cette situation va venir quelque peu bouleverser l'état de notre personnage qui va devoir génialement jongler entre ses personnalités, mais de façon assez subtile, et c'est ça qui est génial dans le film. La friction qui va se créer entre un personnage qui se comporte dans la continuité de la personnalité qu'il avait lors de la rencontre avec cette femme (jouée par Adria Arjona) et ce faux tueur à gage. 

Position qu'on sait bien intenable, mais le film est surprenant dans la manière dont il va retourner ses cartes. Le film réussit à apporter une tension que l'on ne soupçonnait pas forcément. Je pense notamment à une séquence qui est selon moi la meilleure du film, avant laquelle on ne sait absolument pas comment les personnages vont réussir à s'en sortir. Et ce moment produit un effet assez stupéfiant où la tension laisse place à une scène hilarante où on ri avec les personnages grâce à une astuce géniale de la part de Gary. 

Et c'est ça que j'aime chez Linklater et la raison principale pour laquelle je vais me souvenir de ce film. Il aime profondément ces personnages, et même dans ses films moins bons, on se souvient toujours de ses personnages. Et là, le concept fonctionne, la tension fonctionne, mais en plus, ce duo est assez merveilleux et Linklater exploite complétement cette relation qu'il met en place, qui viendra prendre la place de la petite drôlerie promise par les changements de personnalité du personnage. 

Je n'ai pas parlé des autres personnages, mais on retiendra également celui de Jasper qui devient de plus en plus intéressant, s'apparentant presque à une métaphore de la pression qu'a Gary sur ses épaules.

Pour résumer, ça fourmille de petites trouvailles, c'est très bien tenu, charmant et vraiment drôle. À la limite, peut-être un peu classique dans la mise en scène, je pense que Linklater est surtout un excellent scénariste.