Le village.
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Le deuxième volet de la trilogie Cornetto commence par un défi qui résume bien l’état d’esprit d’Edgar Wright : fi de la facilité de confronter sa bande de demeurés à des zombies, place à la bien plus terrible épreuve de la normalité. Simon Pegg, propulsé en super flic austère, se voit ainsi muté dans un village britannique jusqu’au bout de ses ruelles pimpantes, bien décidé à y faire respecter la loi au grand dam de la police municipale pour laquelle les petits arrangements de promiscuité jusqu’alors en vigueur lui seyait parfaitement.
Plusieurs genres passent sous les mâchoires réjouissantes de la parodie : le policier provincial des séries télés du troisième âge, le soap, pour converger le western, voire le slasher pendant Scream.
Wright est désormais en vitesse de croisière dans l’esthétique qui fait sa patte, et peut avoir tendance à en abuser : le nombre de séquences de montage en cut abrupt est un peu gratuit par moment, et son formalisme n’est pas toujours entièrement au service du comique. Il n’empêche que son sens du détail fait le plus souvent mouche : sa façon de caractériser une aussi vaste galerie de personnages secondaires, son attrait pour le comique purement visuel (les mains qui entrent dans le plan, le running gag du gâteau au poste de police) ou verbal (les décalages avec les mots croisés, par exemple) attestent d’un savoir-faire toujours aussi précis et efficace.
Le charme de sa comédie provient aussi de ce qu’elle ne tourne pas forcément à vide : la parodie est souvent une fin en elle-même, se contentant de détourner les codes d’un genre établi, souvent médiocre pour y puiser sa force. Chez Wright, l’ambition est plus grande : de la même façon qu’il montrait à quel point la société fait de nous des zombies dans Shaun of the Dead, et qu’il fera de la médiocrité une qualité foncièrement humaine dans Le dernier pub avant la fin du monde, il s’attaque ici au conformisme et au fascisme latent de la perfection provinciale. Sa malice à proposer de fausses pistes en matière de polar dit surtout l’incapacité du protagoniste lui-même à sortir du code dans lequel on l’enferme, à savoir la banale enquête policière, quand le cinéaste cherche surtout à retourner le pimpant village comme un gant pour en révéler les coulisses nauséabondes et son fameux « greater good »
Un peu long (tenir deux heures sur un tel rythme comique, et avec une telle profusion visuelle est un autre défi qui n’était peut-être pas indispensable) mais toujours aussi bien interprété, méchant et vif, Hot Fuzz tient la plupart de ses promesses, et affirme avec éclat qu’aucun sujet, si banal soit-il, ne semble pouvoir résister à la verve comique de Wright et sa bande.
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le 9 déc. 2016
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