Couper le dernier tome en deux films est devenu une manie dans les adaptations de romans adolescents à succès. Comme Harry Potter, comme Twilight, comme Divergente,Hunger Games voit donc son finale charcuté en «volets» pour maximiser la fidélité au bouquin et les bénéfices au box-office. L’exercice risque de déplaire aux spectateurs les moins familiers de la trilogie, pour qui deux heures de complot politique paraîtront sans doute un peu fades. Mais cette ambiance si différente n’en est pas moins intéressante.
La jeune héroïne Katniss a triomphé deux fois, déjà, des «Jeux de la faim» où le gouvernement totalitaire de Panem envoie des enfants s’entretuer pour leur apprendre la vie. C’est raté : poussés à bout, les ados ont moins envie de courber l’échine que de fomenter une révolution. Katniss intègre donc le District Treize, bunker top-secret où sont protégés les citoyens ayant fui l’oppression, sous le commandement d’une présidente insurgée (Julianne Moore) et du grand organisateur des Jeux lui-même, qui en a orchestré le sabotage avant de rejoindre les rangs rebelles - incarné par Philip Seymour Hoffman juste avant de casser sa pipe. L’heure est à la guerre de communication, et Katniss accepte de jouer la tête d’affiche de la cause rebelle pour encourager le soulèvement du peuple.
Fini les courses-poursuites et démonstrations de chasse à l’arc dans la jungle. Cet Hunger Games-là est intime, souvent confiné entre les quatre murs du quartier général rebelle, et repose entièrement sur les épaules de Jennifer Lawrence. Du haut de ses 23 ans, elle est parfaite. Renfrognée, casse-cou, désobéissante, meurtrie, Katniss ronge son frein, coincée dans son rôle publicitaire alors que, dehors, on meurt. Il suffit d’admirer avec elle les décombres fumants de sa terre natale rasée par l’armée pour sentir monter sa fureur froide. Il faut dire que le réalisateur s’y connaît en solitude sur champs de ruines : après Je suis une légende, Francis Lawrence offre au film une ambiance de guerre assez réussie. Rendez-vous dans un an pour l’assaut.