HYÈNES (Djibril Diop Mambety, SEN, 1992, 110min) :
Cette fable splendide raconte l’histoire d’une ancienne “bonne” expulsée de Colobane, petite bourgade fantôme de la banlieue de Dakar perdue dans le Sahel. Trente ans après, elle revient avec la ferme intention de se venger de son ancien amant, l’épicier Dramaan Drameh, qui avait contesté être le père de l’enfant qu’elle portait. Devenue milliardaire et surnommée à présent Linguère Ramatou (l’oiseau noir de la légende pharaonique, l’âme des morts), celle-ci compte bien profiter de sa fortune pour tenter de corrompre la population locale, avec de multiples cadeaux offerts (ventilateur, frigidaire, chaussures…), dans le but de les liguer contre l’ancien amoureux lâche. Une photographie à couper le souffle, une mise en scène colorée et romanesque, le cinéaste sénégalais Djibril Diop Mambety insuffle une réelle profondeur à un récit malin digne des pièces antiques. La narration parfois théâtrale mêle lyrisme et poésie pour mieux fustiger la corruption des êtres humains face au pouvoir de l’argent et mettre à jour les hyènes qui sommeillent en chacun. Ce poème politique captivant sublimé par la beauté des costumes et les enivrantes compositions musicales de Wasis Diop demeure un conte intemporel et universel. À redécouvrir !