S'il est un exercice compliqué dans le genre documentaire, c'est bel et bien le portrait d'artiste et plus particulièrement de cinéaste. Difficile en effet de rendre toute sa justice, tout son charme à une oeuvre forcément charcutée en quelques séquences illustratives, une succession d'interviews forcément généralistes ou le risque de vouloir copier, sans trop de succès, l'auteur que l'on évoque. Rares sont les réalisateurs à s'être sorti brillamment de cet exercice (citons Chris Marker et certains André Labarthe) et hélas Marianne Lambert ne réussit pas encore pleinement l'examen.
Il s'en est fallu de peu : hommage pas trop appuyé, teinté d'amour et de bienveillance de la cinéaste à l'égard de son sujet, I don't belong anywhere fera découvrir certains aspects insoupçonnés ou méconnu du cinéma d'Akerman, excessivement riche mais parfois trop hermétique. Les interventions d'Akerman sont, comme on peut s'en douter, l'or brut de ce film, Akerman parlant intelligemment et hélas pour la dernière fois de son propre cinéma, de son univers et de ses angoisses. Les autres intervenants, parmi lesquels se trouve Gus Van Sant, n'apportent toutefois pas grand chose en dehors de deux trois anecdotes et de réflexions presque hagiographiques sur leurs rencontres avec Akerman. Trop fourre-tout, brimé par sa longueur qu'on aurait voulu, pour une fois, allongée, I don't belong anywhere rempli le cahier des charges de la production télévisuelle standard, alors qu'il regorge visiblement d'un fort potentiel. Dommage.