Eh bien, le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il s'en passe des choses étranges dans la petite ville américaine modèle au cœur de "I See You"... Mais genre vraiment tout plein ! Et tout le temps !
D'abord, un petit garçon disparaît et réveille le traumatisme d'une ancienne série de meurtres d'enfants commis au même endroit par un pédophile aujourd'hui sous les verrous. Ensuite, l'enquêteur en charge du dossier a lui-même quelques soucis sous son propre toit. Non seulement l'ambiance familiale n'est déjà pas au beau fixe mais lui, sa femme et son fils sont les témoins d'événements de plus en plus étranges voyant des objets disparaître dans leur maison, des appareils s'allumer sans raison et bien pire...
Et, si tout ça ne vous inquiète pas encore, le talent inné de Helen Hunt à faire des têtes de morte-vivante dès que la caméra se pose sur elle ou les plans aériens répétitifs suggérant une présence omnisciente au-dessus de la petite vie de ces personnages devraient achever de vous convaincre qu'il se trame ici quelque chose de très louche ! Oui, mais quoi au juste ? C'est là la grande question qui va animer les 45 premières minutes de ce "I See You" volontairement énigmatique.
Malheureusement, si l'ambiance pesante voulue fait son petit effet pendant quelques temps, elle se met à disparaître assez rapidement devant ce qui ressemble à une compilation de situations très grossières d'un thriller surnaturel sans véritable ligne directrice. C'est d'ailleurs le problème majeur de la première moitié de "I See You", son réalisateur Adam Randall cherche à entretenir le mystère à tout prix sans absolument rien dévoiler de ce qui peut à amener à sa compréhension et, dans le même temps, il s'éparpille dans un va-et-vient incessant entre son enquête policière et les différents problèmes rencontrés par la famille héroïne (sans compter qu'il insère une intrigue ronflante d'adultère au milieu des phénomènes bizarres). À force de ne rien vouloir divulguer de sa teneur, "I See You" se met ainsi à faire dangereusement du surplace et démontre la faiblesse de sa proposition, pas non plus aidé par le manque cruel d'originalité des "anomalies" qu'il se contente d'entasser à l'écran.
Bref, à mi-parcours, il devient très dur de se passionner pour les enjeux de toute cette histoire, on s'en fiche même carrément à vrai dire...


(Mal)Heureusement, c'est là que le film choisit d'exposer ce qu'il croit être sa plus belle idée pour nous faire lever un sourcil d'étonnement. Dans le fond, il n'a pas tort, celle-ci n'est pas neuve mais il faut reconnaître que la manière dont le découpage de "I See You" s'oriente autour d'elle est plutôt maligne et inédite a priori...
Hélas, cette construction se pensant astucieuse va une fois de plus se retourner contre le long-métrage décidément maudit sur ses intentions de départ.
Déjà, en jouant sur des codes à la lisière de plusieurs genres, l'atmosphère de la première partie nous avait laissé espérer une révélation d'une ampleur disons... différente de celle à laquelle on fait désormais face. Le film court donc de fait le risque d'avoir un effet déceptif de ce côté-là, d'autant plus que cette direction n'a rien de nouveau pour peu que l'on soit amateurs de ce genre d'histoire au cinéma (notamment ces dernières années), seule la manière de la raconter change ici.
L'espoir suscité par cette méthode de narration laisse place ensuite à la déconvenue. Ce qui est habituellement laissé à des flashbacks explicatifs dans d'autres films devient ici l'essentiel du contenu de la deuxième moitié de "I See You" et le regain d'intérêt en découlant s'évapore considérablement sur la longueur. La première partie n'était que mystères, la seconde ne sera que réponses, se donnant pour but de combler chaque trou noir laissé en suspens jusqu'à ne plus être capable de créer le moindre effet de surprise connexe (dès que le plus est important est connu, on aura toujours trois ou quatre coups d'avance sur ce qui lui est conséquent).
Enfin, afin de relier tous les points isolés de son récit et lui donner un sens global, "I See You" sacrifie le peu de la crédibilité qu'il lui restait en s'embarquant sur des piste bien trop abracadabrantes pour être un minimum réalistes. Les deux nemesis finales du film (ceux qui étaient à l'origine de toute cette affaire) en seront les plus parfaits symboles, des personnages empruntant des parcours tellement incroyables pour en arriver là qu'ils ne peuvent qu'engendrer un regard distancié (voire amusé ou dépité, c'est selon) de la part du spectateur.


Sur le papier, il est facile de comprendre pourquoi le scénario de "I See You" (signé par l'acteur Devon Graye) a su attirer les regards vu le certain potentiel qu'il en émane. Mais, à l'écran, le résultat souffre de tellement de défauts et de facilités qu'on a vraiment l'impression de découvrir un mauvais roman de gare cinématographique.

RedArrow
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le 13 janv. 2020

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RedArrow

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