Inside Llewyn Davis met en scène une semaine ordinaire dans la vie d’un musicien sans domicile fixe, aigri, acerbe, ingrat, qui parvient toujours à trouver un toit où dormir malgré l’antipathie extrême qu’il dégage. Un jour, alors qu’il se réveille après s’être fait méchamment savater la gueule—sans l’avoir démérité—il se retrouve contraint de traîner avec lui le fardeau d’un chat, symbole de tout ce qui lui échappe dans son existence, du temps qui file entre ses doigts, et de la mélancolie qu'il traine dans les rues de New York.

Cette figure, cette identité d’artiste maudit et incompris - superbement représentée sur l'affiche du film- on comprend peu à peu qu’il l’a façonnée après la perte de son ancien partenaire, sans jamais en exprimer ouvertement le moindre regret. Pourtant, à l’écran, il est évident qu’il n’en a jamais fait le deuil et qu’il s’en sert intérieurement comme justification à son désenchantement.

Se développe alors, tout au long du film, les troubles d'une fuite perpétuelle face à lui-même, sans espoir qu’il trouve quoi que ce soit au bout du tunnel. La séquence du road trip vers Chicago se déploie superbement dans une mise en scène très onrique à la Lynch, comme pour nous plonger dans la psyché intérieur de Llewyn.

Bref, j’ai trouvé que c’était un très beau film sur la trentaine et les rêves de jeunesse déchus, sur la fuite de soi-même et cette colère contre le monde, reflet de ce que l’on refuse d’accepter en nous.

Une œuvre profondément intimiste, qui est peut-être aussi, pour Joel et Ethan Coen, une expression de la vie qu’ils auraient pu avoir si le cinéma n’avait pas fonctionné, ou encore une méditation sur ce qu’il serait advenu si l’un des deux frères avait perdu l’autre en cours de route.

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