L'équation irrésolue d'Interstellar
Interstellar veut aborder le thème du voyage dans le temps de manière accessible, le temps d'un film, et de façon la plus réaliste possible. C'est une démarche ambitieuse et que je trouve honnête : mêler vulgarisation scientifique et cinéma me donnait l'eau à la bouche. Mais cela ne fonctionne pas très bien ici...
Premièrement, pour que chacun puisse comprendre l'histoire et les enjeux du scénario, le film commence sur une trop longue introduction qui va légitimer le départ du héros à la recherche d'une autre planète pour sauver l'humanité. C'est long, mais cela va pourtant trop vite pour être crédible : le personnage principal donne l'impression d'accepter tous les événements sans jamais vraiment s'étonner. De plus, afin de faire comprendre les bases scientifiques du film à tous (relativité d'Einstein, trou de ver, trou noir), le héros se voit expliquer ces faits par des personnages secondaires à plusieurs reprises dans le film. C'est tout de même peu crédible qu'un ancien de la NASA et ingénieur ne connaisse en rien ces notions. Même si c'est plutôt bien expliqué et sans donner l'impression d'un cours scolaire, c'est assez gênant. Nolan aurait dû plus faire confiance à ses spectateurs et/ou y aller plus finement...
Deuxièmement, on ne laisse pas place à l'interprétation et à l'imagination dans Interstellar, et c'est un peu dommage. La volonté de réalisme empêche tout grain de folie que l'on peut trouver dans l'animé Steins;Gate par exemple, qui traite aussi de voyage dans le temps, mais de manière décalée. Là, l'équation fonctionne car l'intrigue est développé sur 26 épisodes, et le réalisme n'est pas la priorité (le voyage dans le temps s'effectue avec un micro-ondes.). À la limite, les robots d'Interstellar, entre le monolithe de 2001 et un Enderman de Minecraft, apportent une touche d'onirisme et d'humour.
Aussi, le côté blockbuster est parfois un peu dégoulinant dans les dialogues et les actions ; notamment certaines avec les vaisseaux qui m'ont fait sincèrement rire (vous pensez aussi à cette manœuvre badass ?).
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Pour les habitués, je pense que le scénario et le petit twist "de la bibliothèque" paraîtra évident. On se demande quand est-ce que ça va arriver, et c'est un peu pénible ; ça ne sauve pas le film. Cependant pour les non-habitués, cela doit sûrement faire son petit effet.
En dehors de ça, J'ai vraiment aimé les représentations visuelles du passage dans le trou de ver, du trou noir, et de la cinquième dimension. Cette dernière est visuellement très intéressante.
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Au final, j'aurais plus apprécié ce film si je l'avais vu il y a 2 ou 3 ans, à l'époque où je ne regardais pas beaucoup de films et où je ne m'intéressais pas vraiment au milieu scientifique. Et c'est pour cela que je mets 6/10 à Interstellar, car je pense que c'est tout de même un bon film pour ceux qui vont au cinéma que quelques fois dans l'année (ce n'est absolument pas du mépris pour ceux qui ont adoré le film). Les images sont belles, on ne s'ennuie pas réellement, il y a des rebondissements, une histoire qui tient la route et de bonnes idées.
Je vais regarder Solaris à présent. Ben oui, Tarkovski est conseillé à peu près toutes les 2 pages sur SC, il faut bien que je m'y mette un jour...