Whaou, ce film est d’une violence. Le regarder ne laisse pas insensible. J’avais été attiré par le double concept de film à rebours et de plan-séquence, mais j’avoue que je ne m’attendais pas à me prendre une telle baffe. Ce film est impitoyable, et d’une redoutable efficacité dans son propos. Les deux concepts qui m’ont attiré sont ici utilisés de façon percutante, amplifiant de façon dramatique le cœur même de l’intrigue. Savoir comment cela se finit sans savoir comment cela a commencé est presque aussi pire que l’inverse au final. J’ai beaucoup aimé la mise en scène de Gaspar Noé ici, tant elle retranscrit (trop) bien l’état d’esprit des personnages à plusieurs moment du récit, et comment cela s’accorde avec le récit lui-même.
Alors que le début est chaotique, décousu, avec des scènes très courtes comme si l’esprit des personnages était incapable de penser sur le long terme mais uniquement par tranche de quelques secondes ; peu à peu, le film s’allonge, se pose, se calme, prenant presque le court normal des choses. Et tout cela est cristallisé lors de la scène pivot : la première partie, lorsqu’on voit la glace se briser chez Marcus, puis ensuite lors de cette insoutenable scène du viol d’Alex, où on sent à la fois toute la puissance du violeur et son impunité (illustrée par le personnage en fond qui apparaît puis se retourne sans rien faire), notre impuissance face à cela, et bien sûr la terrible détresse d’Alex. Au départ, ce n’est que de la détresse, puis lorsqu’on découvre le « avant », ça en devient que plus tragique.
Le trio de tête du casting est formidable, que ce soit Monica Bellucci, au départ rayonnante puis complètement désespérée ; Dupontel calme puis déboussolé ; et puis bien sûr, Cassel qui se régale sur les différentes facettes de son rôle comme il sait si bien le faire. Un pur régal. Comme je l’ai déjà dit, la mise en scène de Noé est diablement percutante, incisive, réussissant parfaitement à faire ressortir l’ambiance du récit, à nous y plonger et à nous l’imposer, pouvant créer plusieurs fois le malaise malsain. Les mouvements de la caméra s’apparentent au départ à un personnage externe (une mouche par exemple), mais très vite on comprend, comme je l’ai dit, qu’elle représente l’état esprit même des personnages et c’est vraiment très bien tourné.
Irréversible est ce qu’on peut appeler un film coup de poing. Son concept de base était vraiment très intéressant, mais si on n’y est pas préparé, l’intrigue peut faire office d’un véritable raz-de-marée tellement son impact sur le spectateur est puissant. Peu de film ont réussi à me déstabiliser autant, je tire mon chapeau à Gaspar Noé.