Mouai, j'ai l'impression qu'en partant aux US, une certaine rupture s'est créée entre Fritz Lang et moi (pour sa défense, c'était pour fuir les nazis, ce qui me semble amplement justifié).
Je ne doute pas que J'ai le droit de vivre était vraiment bon à sa sortie, mais je pense qu'on a droit ici à un film qui a particulièrement mal vieilli : le coup du type en prison pour un crime qu'il n'a pas commis, c'est du vu et revu, et le long-métrage dont il est question subit cela de plein fouet. On retrouve pas mal de clichés liés à ce genre de films : le fait qu'Eddie se fasse traiter comme une merde par certains parce qu'il sort de prison, la tentation de se faire de l'argent illégalement…
Surtout qu'on n'est pas non plus face à une œuvre avec un scénario extrêmement profond. Le coup de « vous êtes automatiquement mis à mort si vous allez en prison une quatrième fois » est grossier en plus d'être ridicule. J'ai aussi eu du mal à avaler le fait qu'une avocate commise d'office (public defender dans la langue des diabétiques) soit en couple avec un malfrat. Enfin, quitte à fuir les autorités, je vous recommanderais de changer d'apparence, au minimum de changer de coupe de cheveux… ça vous évitera de vous faire remarquer par un vieil homme au beau milieu de la nuit alors que vous êtes parti aller chercher des clopes (ce qui n'est vraiment pas de chance).
J'ai tout de même apprécié le fait qu'on ne nous révèle pas directement si Eddie a bien commis le braquage ou non. Le fait qu'il soit ambivalent par moment (il frappe son ancien patron et demande à sa femme de lui fournir un pistolet alors qu'il est en prison) rend le personnage moins lisse qu'on ne pourrait le croire. Bon après, on ne doute pas de la gentillesse d'Henry Fonda, bien que son rôle, plus ambigu que d'habitude, préfigure un Il était une fois dans l'Ouest paru plus de 30 ans plus tard.
On pourrait critiquer l'absence d'enquête, mais aussi de procès, mais ce serait oublier que l'intégralité de la seconde partie de Fury, le précédent film de Fritz Lang, sorti un an plus tôt, reposait déjà sur ça, on peut comprendre qu'il ait évité de faire doublon.
Bref, un film qui a quand même un peu mal vieilli, prévisible et pas forcément intéressant. De surcroit, si la patte de Lang n'a pas complétement disparu (on retrouve l'overlapping audio notamment), force est de constater qu'il s'est (fait) effacé avec ce J'ai le droit de vivre. Je ne doute pas du fait que le film avait un certain poids à l'époque de sa sortie, mais difficile de le recommander aujourd'hui tant il n'a rien à proposer face aux autres films du genre… à la limite, peut-être pour le côté « Bonnie & Clyde inversé »… mouai, peut-être…
PS : contrairement à ce qui est dit par Eddie, quand une grenouille meurt, l'autre ne se laisse pas tuer : il s'agit d'une croyance populaire non fondée de plus. Comptez sur moi pour débunker d'autres idées reçues à l'avenir.