Un scénario comme le sien, « Jackie Chan dans le Bronx » aurait dû entrer directement dans la catégorie nanar. Et pourtant, derrière son affiche et son histoire trompeuse se cache quelque chose de totalement différent. Pas de fonds verts, pas de câbles, Jackie en bon samaritain qu’il est, débarque aux Etats Unis et entend bien faire fuir les punks menaçants continuellement la superette de son oncle. Ca va cogner…encore…
Jackie Chan dans le Bronx, ce faux nanar
Jackie Chan dans le Bronx, que de bons souvenirs. Ce nouveau Jackie Chan, à l'époque, il m'avait bien déstabilisé, carrément choqué en une scène. Une première à l’époque. Les héros ne sont pas invincibles mais ne se laissent jamais dominer par la peur, voila ce que Jackie Chan dans le Bronx voulait nous démontrer. Ce film fut le premier film de l'acteur à obtenir une certaine renommée aux Etats Unis, allant jusqu’à petit à petit lui faire un nom à Hollywood. Comme à son habitude, ce qu’on en retiendra de son nouvel action movie, ça ne risque pas d’être son scénario présent uniquement pour justifier de ces scènes d’action. Néanmoins, en milieu de film, on se retrouvera quand même avec une intrigue plus riche, impliquant du trafic de diamants, des flics véreux, et un Jackie Chan embarqué de force dans une affaire qui le dépasse, devant bosser avec les autorités américaines. Ici, surprise, les fans numéro un de l’acteur vont découvrir quelque chose qu’ils n’ont pas encore vu. Les caractéristiques de Jackie, tout ce qui fait le charme de ces films, Stanley Tong va les bouleverser.
Pourtant, dans les premières minutes, tout ce passe plutôt bien, hormis le lieu de l’intrigue, pas de sensation de changements, nous naviguons dans le ton et l'esprit des films propres à Jackie Chan se permettant au passage de nous montrer que le rêve américain peut se transformer en « cauchemar » américain.
Ce ne sera que quelques minutes plus tard que le changement opèrera réellement. Voila qu’en une seule séquence, nous prenons un gros tournant, basculant dans la violence plutôt hard compte tenu des œuvres habituelles. Une petite séquence d’environ 2minutes voyant notre héros tomber dans un guet-apens, puis, coincé dans une ruelle, se retrouve passé à tabac par des punks lui envoyant des bouteilles de verres au point qu’il finisse sans vie, sur le sol, baignant dans son sang, ça ne sera que le seul passage violent de l’histoire.
La suite, bien qu’incluant pêle-mêle un gosse handicapé giflé à sang à plusieurs reprises et un wesh balançant dans un broyeur (scène suggérée), se voudra plus propre, jonglant entre humour et drame, reprenant le chemin des films que l’on connait, tout en ayant par moments ce sentiments d’angoisse après avoir vu que Jackie, face à plein de mecs armés jusqu’aux dents, il peut galérer à s’en sortir. Jackie, il a du mal à s’adapter aux règles et à la vie américaine. Stanley Tong a fait en sorte que nous ressentions ce que le personnage ressent tout au long du film. Dans tous ces films, Jackie semble tout contrôler. Pas dans le Bronx. Tong a réussi son coup.
Plus que jamais, Jackie maitrise les arts martiaux, continue de réaliser des cascades complètement folles au point où il avait foulé sa cheville lors de la célèbre scène de l'aéroglisseur. Increvable, l'acteur avait continué le tournage, enfilant une grosse chaussette imitation basket sur son plâtre. Des scènes si surprenantes, vous en trouverez plein dans ce film, notamment celle voyant notre acrobate Chinois sauter d’un immeuble à un autre pour échapper à ses assaillants…encore. Dans ce film mi-américain, mi-chinois, c’est simple, il ne fait que ça. En décidant de s’interposer, il c’est mis à dos les racailles du coin qui ont trouvé leur tête de turque. Pas sûr qu’elle se laisse faire indéfiniment la tête de turque.
Il faut savoir s’adapter. Tu es en Amérique maintenant.
Le bon samaritain Chinois dans le Bronx
Notre pauvre Jackie Chan, aussi souriant qu’il soit, c’est la version Chinois de John McClane, toujours là au mauvais endroit au mauvais moment. Ce qui devait au départ n’être qu’une visite de courtoisie familiale, en découlera son lot de problèmes incitant ce personnage et sa grandeur d’âme à rester et à faire ce qu’il sait faire le mieux : botter les fesses des vilains pas beaux et tenter de les remettre sur le droit chemin. Pour les délinquants, c’est possible, pour les flics ripoux là… .
Certains cœurs de pierre peuvent reprocher à « Jackie Chan dans le Bronx » de verser par moments dans la niaiserie au travers d’un des personnages secondaires, le petit Danny, jeune garçon cloué dans son fauteuil roulant et vivant avec sa sœur, petite amie d’un chef de gang. Ces mêmes cœurs de pierre vont sans aucun doute possible lever les yeux au ciel face aux gourdasseries de la potiche Elaina, aux méchants stéréotypés (mention à Angelo, le second de la bande, blondinet peroxydé dans l’âme), au héros courageux et bienveillant. Et si ces défauts étaient des qualités ?
Pour empêcher aux films d’action d’être trop orienté action et de ne posséder aucune âme, vous devez toujours inclure de l’émotion et veiller à engager un acteur expressif. Attention, émotion d’accord, MAIS vraie émotion. Jackie Chan dans le Bronx ce devait donc, pour jouer sur la corde sensible, développer le charisme, faire naitre de l’empathie à son personnage principal afin d’éviter de le rendre insensible. Pour ça, on a la recette idéale : lui faire rencontrer des personnages fragiles, dans le besoin. Qui d’autre qu’une sœur paumée de 21 ans, élevant seule son frère handicapé aurait pu nous toucher autant ? Ce simple élément ne rendra que plus délicieuses les scènes de combats se devant de rétablir la justice. Partant de là, Jackie Chan dans le Bronx fonctionne du tonnerre.
Qu'importe si son intrigue manque un peu d'originalité, un soin tout particulier a été opéré sur le développement et l’évolution des personnages qu’ils soient du bon ou mauvais coté. Surtout, c’est bel et bien sur le fait de voir un Jackie Chan en mauvaise posture, que l’inédit se montre et même si l'acteur continue ses acrobaties et ses grimaces, il arrive une nouvelle fois à nous surprendre. Ses affrontements lui faisant utiliser des éléments du décor ne sont plus autant drôles. Ils sont nerveux, sérieux.
De toute sa filmographie, Jackie et son « Jackie Chan dans le Bronx » fait partie des « élus » qui se démarquent. Il se démarque pour son changement de ton, pour ces cascades encore plus spectaculaires que d'habitude, pour son environnement, pour certains personnages secondaires attachants (Danny et sa sœur, l’oncle Bill et sa femme excentrique, Elaina qui derrière son comportement de cucul, nous donne envie de la protéger), pour la naissance d’une nouvelle intrigue en cours de route, et, arts martiaux oblige, ses scènes de combats défoulant. Nous divertir, c’était son but, évité de trop nous stresser en intégrant de manière justifiée l’émotion et humour pour adoucir le tout. Le contrat a été rempli.
Tous autant que vous êtes, vous voulez passer le restant de vos jours
à battre les gens et à la voler. Même les animaux ce comportent mieux.
Vous n’êtes que des déchets de l’humanité, voila ce que vous êtes.
Au final, Jackie dans le Bronx, on ne peut rien lui reprocher. L’une des œuvres les plus réussies de la filmographie de Jackie Chan malgré un scénario le faisant partir au départ perdant. Ca respire bon le film d’action des années 90 grâce à la mise en scène mi-Chinoise/mi-blockbuster américain, au rythme, aux musiques épiques/rock, affrontements, rebondissements, cascades spectaculaires, dialogues plus complexes qu’à l’accoutumée, personnages travaillés, humour bon enfant, méchants idiots, méchant pas si méchant, héros courageux mettant sa vie en péril pour sauver les démunis, le tout en acte totalement désintéressé, référence à l’esprit des action hero américains (Jackie exhibant ses biscotos dans son débardeur noir). Des films si authentiques que ça, on en fait plus. Forcément, quand on en trouve un qui date d’une époque où on savait ce qu’était l’authenticité, on va se précipiter dessus. Et bien celui là, si vous ne le connaissez pas, précipitez-vous justement dessus.