Je Préfère qu’on reste amis possède déjà l’approche qui fera la patte Toledano-Nakache : partir d’un fait social contemporain qui trouve un accompagnement sous forme de procédure ou de cérémonial et le transformer en machine burlesque. Le mariage dans Le Sens de la Fête, l’aide à la personne dans Intouchables, les camps de vacances dans Nos Jours heureux. Pour leur premier film, le duo de réalisateurs s’intéresse aux agences de rencontre et se saisit de deux losers attachants que forment les très bons Depardieu et Rouve. Mais, au-delà de la thématique sociétale adoptée, c’est dans son traitement tonal que le parti pris comique trouve son originalité : le drame est constamment présent et manque de pousser nos héros à la renverse ; il demeure néanmoins désamorcé par la capacité d’un couple d’amis ou d’un groupe à se renvoyer l’image ridicule et sensible de soi-même par le biais de l’autre. Voilà pourquoi – du moins peut-on l’interpréter ainsi – leur cinéma aime les ambiances jazz, et la partition de Bruno Coulais colore le métrage de ses sonorités si particulières : le jazz exige l’affrontement des instruments tel le corps-à-corps de deux physionomies que tout oppose, l’une étant chétive et maladive, l’autre enjouée et brute. Si l’ensemble amuse et fait sourire, si les deux comédiens fonctionnent bien, nous ne pouvons que regretter le faible mordant d’un film qui, trop souvent, épouse la mélancolie déprimante de ses protagonistes, au point d’accuser de réelles chutes de rythme. La répétition ad nauseam des scènes frôle le programmatique et ne rend pas justice au potentiel immense du tandem Depardieu-Rouve. Pas de fête au programme, donc. Reste un métrage sympathique et tendre qui parvient à capter, non sans justesse, la sensibilité masculine.