Le destin a un plan pour nous tous
Comédie américaine signée par les réalisateurs de Cyrus, Jeff Who Lives at Home marque surtout la confrontation entre deux stars du petit écran et en devenir au cinéma (quoiqu'on peut considérer qu'ils le sont à présent) : Jason Segel et Ed Helms. Ces deux -là doivent le début de leur notoriété à deux sitcoms très populaires : How I Met Your Mother pour Jason et The Office pour Ed.
A la surprise générale, Jason Segel a évincé le reste du casting du sitcom et sera celui qui aura su faire le saut au grand écran, l'acteur jouant Barney a été aperçu dans le catastrophique Les Schtroumpfs et l'actrice jouant Robin apparaît dans un second rôle dans le blockbuster majeur Avengers. Marshall (le personnage de Jason Segel dans How I Met Your Mother) a fait un premiers pas dans un second rôle avec En cloque, mode d'emploi avant d'exploser l'année suivante avec le réussi Sans Sarah rien ne va ! Toutefois, il connaîtra la consécration avec Les Muppets, le retour (sorti pitoyablement en DTV chez nous) et Bad Teacher (où il incarne un prof d'EPS hilarant capable de s'embrouiller avec un de ses élèves pour savoir de qui Jordan ou LeBron James est le plus fort).
Ed Helms a connu une destinée similaire sinon qu'elle a été plus fulgurante. Multipliant les seconds rôles mineurs dans de multiples comédies, il se fera remarquer en incarnant Andy Bernard, un des subordonnés de l'impayable Michael Scott (Steve Carell) dans le sitcom The Office mais c'est son rôle de Stu dans Very Bad Trip qui lui apportera une soudaine notoriété faisant de lui un des acteurs comiques les plus en vogues à tel point qu'il est désormais le successeur de Steve Carell dans The Office après son départ. On avait aussi pu le voir dans la délectable comédie Bienvenue à Cedar Rapids et on le retrouvera pour le troisième opus de Very Bad Trip. En attendant, il y a toujours The Office qui va rentrer dans sa neuvième saison et vu la qualité toujours constante du show, on ne s'en plaindra pas.
Bref, après une longue introduction pour introduire les deux acteurs jugés assez méconnus en France (peut-être pas Jason Segel). Faisons place à ce crossover de la mort qui tue où tous les super-héros se retrouvent afin de lutter contre un ennemi commun. Euh... non, je me suis gouré, désolé mais les Avengers trottent encore dans ma tête.
Jeff Who Lives at Home commence avec un monologue absolument délicieux avec un Jason Segel poussant une réflexion sur le film Signes de Night Shyamalan. Un monologue à écouter avec grande attention car elle expose tous les enjeux du film, en même temps qu'elle permet de faire connaissance avec le personnage Jeff, celui qui vit à la maison. De l'autre côté, on découvre Ed Helms alias le frère de Jeff et sa femme Judy Greer, une autre habituée de sitcoms avec un superbe tableau de chasse : Mon oncle Charlie, How I Met Your Mother, The Big Bang Theory, Modern Family, Philadelphia, Earl et Arrested Development. Les deux incarnent un couple au bord de la rupture. Et pour finir le tour, le troisième et dernier membre de la famille, la mère incarnée par Susan Sarandon, une femme n'en pouvant plus de son Tanguy de Jeff et noyée sous la déception d'une vie morne.
Le casting est formidable. Jason Segel incarne à merveille le nounours de service, comprendre trognon et affichant faiblesse malgré son corps de yéti tout en réussissant à transmettre des émotions (peu évident pour un acteur comique). Ed Helms joue l'homme avide et mythomane, un individu détestable au premier abord rendant son retour dans le monde des gentils d'autant plus attachant. Susan, fort de son expérience joue à merveille le rôle de cette femme perdue, se demandant où est passé la vie dont elle rêvait et angoissant sur le nombre de jours heureux à venir. Judy Greer complète en apportant un rôle féminin dont elle a le secret, une froideur mêlée à une chaleur cachée, déroutant.
Le film se déroule en moins de 24h (mais pas chrono) et multiplie les péripéties assez drôles sans jamais verser dans le gargantuesque dont pourtant les américains sont extrêmement friands. Le film vise avant tout à rester le plus réaliste possible faisant bifurquer le long-métrage davantage vers la comédie dramatique que de la pure comédie. Or qui dit drame, dit sentiment, un fait très vrai dans le final ayant réussi à me faire arracher quelques larmes.
SPOILER SPOILER
C'est beau les retrouvailles entre ces deux frères et l'accomplissement du destin de Jeff. Finalement, il n'a pas perdu son père pour rien. J'ai encore dans la tête cette image où on voit Jeff courir comme un dératé devant sa famille qui s'est retrouvé par pur hasard sur le pont. Le destin a un plan pour nous tous, à nous de trouver les signes.
FIN SPOILER
Et pour une fois, le film ne semble pas s'obliger à prolonger certaines séquences afin d'augmenter la durée de vie globale. Le film est court, 1h16 sans générique d'intro et de fin mais assez intense. Agréable pour passer un bon moment. Notons aussi la musique très sympathique sur certaines tranches du film.
Parmi les points mitigés figure au premier plan la réalisation assez déroutante. L'ensemble semble directement sortir d'une série policière : caméra à l'épaule avec quelques utilisations du fast zoom (je ne sais pas comment ça s'appelle mais ça consiste à zoomer presque instantanément sur un point). Un constat assez bizarre pour une comédie mais au final, on s'y accommode et ça donne un cachet original à l'ensemble.
Aussi un autre point mais là, c'est vraiment méchant :
SPOILER SPOILER
A la fin quand les deux frères se retrouvent, on dirait deux homos qui s'aiment surtout quand Jason Segel pose la main sur l'épaule d'Ed, j'ai trouvé ça un peu too much et je n'ai pas pu m'en empêcher de rigoler.
FIN SPOILER